Occupation, Inc. How Settlement Businesses Contribute to Israel’s Violations of Palestinian Rights

Dans la version arabe de «The Voice Kids», deux petites irakienne et syrienne chantent contre la guerre – SLATE.fr

par Fatma-Pia Hotait pour SLATE

Ghina Abou Hamdan et Mariana Hana, toutes deux victimes de la guerre, ont ému le monde arabe sur le plateau de «The Voice Kids».

Ghina Abou Hamdan est syrienne. Samedi 9 janvier, son interprétation d’«Atouna al Tofouli» («Donnez-nous l’enfance») sur le plateau de «The Voice Kids», émission de la chaîne saoudienne MBC 1, a été particulièrement touchante. La fillette, encouragée par sa famille en coulisse, s’est mise à pleurer. Elle avait dit vouloir dédier cette chanson aux enfants syriens, rapporte le Mail Online.

Initialement chantée en 1985 par la chanteuse libanaise Remi Bendali à seulement 6 ans, cette chanson est emblématique de l’enfance brisée par la guerre. À l’époque, le Liban était tiraillé par une guerre civile. Cette chanson avait lancé la carrière de Remi Bendali, issue d’une famille d’artistes.

La chanson originale chantée par Remi Bendali en 1985.

Une autre fillette, Mirna Hanna, a également ému lors de la diffusion de «The Voice Kids» en chantant un poème de la tradition populaire arabe dédié à l’amour. Réfugiée au Liban depuis sept mois, sa famille a dû fuir l’Irak après que «Daech a menacé de kidnapper Mirna», confie son père dans un reportage sur la petite irakienne diffusé lors de l’émission, qui ajoute avoir «tout quitté, même [son] travail pour [sa] fille».

 Mirna a été retenue à «The Voice Kids» grâce à sa voix et sa volonté de «montrer au monde que l’Irak ne se résume pas à la guerre», affirme-t-elle.

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ARABIE SAOUDIE : UNE DICTATURE MOINS PROTEGEE… Richard Labévière

Le 7 février 1995, la parution du livre – L’Arabie Séoudite – La dictature protégée -, aux éditions Albin Michel, ne retint l’attention que de quelques spécialistes. Son auteur diplomate de métier – signant du pseudonyme Jean-Michel Foulquier -, y décrivait par le menu les exécutions au sabre, les sévices de la police religieuse wahhabite et toutes les violations structurelles des droits humains en vigueur dans ce qui, en réalité est moins un pays qu’une propriété familiale privée… Il nous disait aussi que, conformément à l’esprit et la lettre du Pacte du Quincy1, accordant aux Etats-Unis le monopole de l’exploitation des réserves d’hydrocarbures les plus importantes du monde, la famille Saoud bénéficie de la protection totale des administrations américaines successives. Comme le disait Roosevelt du dictateur nicaraguayen Somoza, les Saoud sont bien des fils de pute, mais ce sont nos fils de pute…

De fait, les réalités morbides de cette monarchie ubuesque sont parfaitement connues depuis belle lurette, déroulant quotidiennement sous nos yeux son cortège d’abominations, au vu et su de tous, comme la lettre volée d’Edgar Allan Poe. Mais… motus et bouche cousue ! Jusqu’à très récemment, il était proprement inconcevable de lire dans la presse occidentale quoique ce soit de critique à l’encontre de cette « dictature protégée ». Alors, pourquoi les plumes, les langues et les oreilles se délient-elle seulement aujourd’hui ?

NOUVELLE DONNE GEOPOLITIQUE

On peut d’abord avancer trois causes géopolitiques « larges » : un redéploiement et une délocalisation des intérêts américains ; le retour de l’Iran dans le concert des nations ; une résurgence de l’ancestrale confrontation des mondes sunnite/chi’ite. Viennent ensuite une série de considérations plus « micros » : la faillite des révoltes arabes; la surenchère entre Al-Qaïda et l’organisation « Etat islamique » ; l’extension territoriale du terrorisme islamiste ; enfin, une guerre de succession récurrente au sein même de la monarchie saoudienne. D’une manière générique et hormis le livre pionnier de Jean-Michel Foulquier, quelques candides dont Alain Chouet2, Xavier Raufer3, Pierre Conesa4 et votre serviteur5, répètent depuis plus d’une vingtaine d’années que l’Arabie saoudite constitue l’épicentre de l’Islam radical, de son financement et de son extension. Depuis toutes ces années, les mêmes étaient remisés au rayon, soit des doux rêveurs, soit des dangereux subversifs ou encore plus clairement accusés d’être des amis des dictateurs officiels, les nationalistes arabes s’entend !

Plus sérieusement: les éditorialistes parisiens comme nos gouvernants auraient ils oublié l’une des annonces les plus importantes faites par le président Barack Obama au début de son second mandat? En substance, ce dernier expliquait que, pour les trente à quarante ans à venir, les intérêts stratégiques américains fondamentaux se situaient dans l’Asie-Pacifique et en Asie centrale. Par conséquent, les Proche et Moyen-Orient perdaient leur centralité, jusqu’ici incontestée dans l’agenda des priorités du Département d’Etat et des grandes sociétés américaines. Cette annonce officialisait ainsi l’obsession « eurasienne » martelée depuis des décennies par l’ancien conseiller à la sécurité du président Carter et inspirateur inoxydable des administrations démocrates – Zbigniew Brzezinski -, notamment dans son livre programme Le Grand échiquier – L’Amérique et le reste du monde6.

Dans cette perspective, il devenait impératif pour Washington de normaliser ses relations avec l’un des pays clef de cette Route de la soie vitale allant de Venise à Vladivostok, à savoir la Perse éternelle… Ce fut la signature de l’accord sur le nucléaire iranien. Rarement dans les annales de la diplomatie, une négociation aura été aussi longue et compliquée. Au terme de plusieurs prolongations et d’une ultime journée de tractations fiévreuses, l’Iran et les pays du « P 5+1 » (Etats-Unis, Russie, Chine, France, Royaume-Uni et Allemagne) sont finalement parvenus à un compromis sur le nucléaire iranien, aux premières heures de la journée du mardi 14 juillet à Vienne. L’arrangement fait près d’une centaine de pages, composé d’un texte principal et de cinq annexes. Lourd de conséquences majeures, immédiates et à plus long terme, cet événement historique déclencha l’ire de l’Arabie saoudite, des autres monarchies du Golfe et de plusieurs pays sunnites, sans compter Israël…

LE GRAND RETOUR DE L’IRAN

Ce retour de l’Iran dans la communauté internationale entraîne plusieurs conséquences lourdes, notamment sur le plan pétrolier. Jusqu’aux sanctions internationales, l’Iran était le second plus grand exportateur des pays de l’Organisation des pays exportateurs. Selon les estimations les plus sérieuses, les revenus pétroliers de l’Iran ont augmenté d’un tiers sur l’exercice 2012 pour atteindre 100 milliards de dollars, malgré les sanctions américaines. La même année, les autorités iraniennes estimaient que les revenus annuels générés par cette industrie pourraient atteindre 250 milliards de dollars en 2016. Aujourd’hui, l’Iran prévoit d’investir un total de 500 milliards de dollars dans le secteur pétrolier avant 2025.

Avec la levée des sanctions, la reprise annoncée des investissements étrangers pourrait se concrétiser durant ce premier semestre. « On devrait enregistrer un dégel progressif des avoirs financiers iraniens à l’étranger à partir du début 2016 », explique Michel Makinsky, chercheur associé l’Institut Prospective et Sécurité en Europe (IPSE), « mais sur les 100 à 150 milliards de dollars que les Américains prétendaient bloqués, pas plus de 30 milliards ne semblent être, pour l’instant, mobilisables ». Face à ce marché de 80 millions d’habitants, les entreprises occidentales ont déjà repris le chemin de Téhéran depuis plusieurs mois dans un contexte politique très marqué par le président Hassan Rohani qui souhaite faire de l’Iran un « pays émergent prenant toute sa part dans l’économie mondiale et mondialisée ». Sur le plan financier, les autorités cherchent à restructurer le système bancaire autour de la Banque centrale et une relance des relations avec le Fonds monétaire international.

« Des politiques prudentes ont permis de retrouver une croissance positive l’an dernier et de réduire l’inflation à 15%.. » expliquent les experts du Fonds, « les autorités ont également stabilisé le marché des changes et avancé sur la réforme des subventions. Mais l’économie reste confrontée à des défis structurels. La forte baisse des prix mondiaux du pétrole a refroidi l’activité. Les entreprises pâtissent aussi d’une demande atone, le système bancaire étant confronté à des actifs improductifs élevés et des arriérés accumulés par le secteur public. Le chômage reste élevé, environ 10,5 % », d’après la Banque mondiale. Le gouvernement iranien ambitionne d’atteindre un taux de croissance de 8 % par an, le FMI misant sur 4 à 5 % en 2017. Dans ce contexte, Téhéran souhaite lancer de grands chantiers d’infrastructures routières, portuaires et aéroportuaires. Les projets sont prêts mais les banques attendent l’effectivité de la levée des sanctions. Une mission européenne (France, Grande Bretagne, Allemagne) s’est récemment rendue à Washington pour obtenir des précisions auprès de l’administration financière américaine.

Mais dans l’ambiance de la primaire de leurs prochaines élections présidentielles, les Etats-Unis tentent toujours de freiner l’investissement étranger, cherchant à dissuader les sociétés européennes de revenir en Iran. Quoiqu’il en soit et quel que soit le prochain président des Etats-Unis, le retour du pétrole iranien sur le marché mondial et la reprise des investissements étrangers s’annoncent d’ores et déjà comme un mouvement irréversible. Dans tous les cas de figure, ces prévisions placent l’Iran en situation de s’imposer comme la véritable puissance régionale face à ses deux principaux concurrents de proximité que sont la Turquie et Israël. Cette reconfiguration régionale et internationale ne manque pas de raviverUne guerre de cinq mille ans, pour reprendre les mots du grand journaliste Paul Balta7.

UNE GUERRE DE CINQ MILLE ANS

Dans ce contexte, l’une des premières initiatives du nouveau roi Salman d’Arabie saoudite est d’intervenir militairement au Yémen voisin contre la rébellion houthi, politiquement soutenue par Téhéran. À partir du 26 mars 2015, la force aérienne royale saoudienne, avec l’appui de plusieurs pays sunnites dont l’Égypte et les membres du Conseil de coopération du Golfe excepté Oman, effectue des bombardements sur de nombreuses positions houthis dans l’ouest du pays, dont l’aéroport international El Rahaba et le palais présidentiel de Sanaa. L’ambassadeur saoudien à Washington précise que « l’opération vise à défendre le gouvernement légitime du Yémen et à empêcher le mouvement radical houthi (soutenu par l’Iran) de prendre le contrôle du pays ».

Les États-Unis déclarent également fournir un soutien opérationnel en matière de logistique et de renseignement. Selon la chaîne de télévision Al-Arabiya basée à Dubaï, le royaume saoudien engage dans cette opération une centaine d’avions de guerre et plusieurs dizaines de milliers de soldats. Depuis plus de dix mois, l’aviation saoudienne ravage l’un des pays les plus pauvres du monde, avec l’aval de Washington et des pays européens sans que cela n’émeuve beaucoup la grande presse internationale, les professionnels des droits humains et des indignations sélectives. Dans ce conflit oublié mais très meurtrier, la monarchie wahhabite combat aujourd’hui ses anciens alliés Zaydites qui ont affronté, entre 1962 et 1970, les forces de la République arabe du Yémen, à l’époque soutenues par l’Egypte. Ainsi à cette époque Riyad n’hésitait pas à s’allier avec les parents des Houthis actuels – en réalité très éloignés du chi’isme duodécimain iranien – contre les « tribus républicaines » soutenues par Nasser, le Grand Satan d’un nationalisme arabe appuyé par Moscou ; puis, à partir de 1968, contre le gouvernement révolutionnaire du Sud Yémen pourtant composé de musulmans sunnites mais qui se proclamaient ouvertement communistes.

Mais l’intervention yéménite actuelle a été précédée par des soutiens réitérés au soulèvement des tribus sunnites et des groupes terroristes qui ne supportent pas l’avènement d’un nouveau pouvoir chi’ite en Irak dès le printemps 2003. Le GID – les services secrets de Riyad – n’hésite pas à financer et armer Abou Moussab al-Zarqawi, le chef d’Al-Qaïda en Irak qui opère à partir du Kurdistan d’Irak. C’est à ses tueurs qu’on doit notamment l’assassinat de Sergio de Mello, le représentant spécial de l’ONU à Bagdad le 29 août 2003 ainsi qu’ une série d’attentats meurtriers à Bagdad, ciblant de manière récurrente, personnalités, quartiers et mosquées chi’ites.

En outre, depuis la fin des années 1980, les services du prince Turki al-Faysal Bin Abdulaziz – l’un des parrains d’Oussama Ben Laden – financent et appuient les groupes salafo-jihadistes au Liban et les Frères musulmans de Jordanie. Le 8 décembre 2004, à l’occasion d’un entretien avec leWashington-Post, le roi Abdallah II de Jordanie – un pays allié de Riyad, de Washington et de Tel-Aviv – avait surpris aussi bien le monde arabo-musulman que ses partenaires occidentaux en mettant en garde contre l’émergence d’un « croissant chi’ite » allant de l’Iran au Liban, comprenant également l’Irak post-Saddam, la Syrie des Assad, Bahreïn et les régions pétrolières d’Arabie saoudite…

DECAPITATIONS PUBLIQUES

En écho à ce fantasme de la menace grandissante d’un croissant chi’ite et accompagnant la montée en puissance des révoltes arabes (printemps 2011), Riyad arme la rébellion sunnite en Syrie, l’encourageant à renverser le régime de Damas (alaouite, composante hétérodoxe du chi’isme). Simultanément, en mars 2011, l’armée saoudienne réprime dans le sang les manifestations de la place de la Perle à Manama, la capitale de Bahreïn dont la population est majoritairement chi’ite. Autrement dit, cette politique saoudienne de la canonnière antichi’ite vient de loin, connaissant une dernière péripétie aggravante avec l’accident survenu à Mina durant le pèlerinage de La Mecque le 24 septembre 2015. Environ un millier de personnes, essentiellement chi’ites trouvent la mort lors d’un mouvement de foule provoqué par les forces de l’ordre accompagnant le déplacement d’un prince saoudien. Non seulement les services locaux de sécurité sont en-dessous de tout, mais circonstance aggravante : l’ancien ambassadeur d’Iran à Beyrouth, en charge notamment des liaisons avec le Hezbollah libanais, participant au pèlerinage, disparaît lui aussi dans de mystérieuses circonstances.

Pendant ce temps-là, les affaires courantes continuent. L’agence officielle de communication saoudienne SPA annonce, le 4 janvier dernier, l’exécution d’un homme condamné à mort pour un meurtre de droit commun. Ahmed ben Obeïd al-Harbi avait été reconnu coupable d’avoir abattu par balle un autre Saoudien à la suite d’une dispute. Mais, la goutte qui fait déborder le vase est que cette sentence porte à 48 le nombre d’exécutions depuis le 1er janvier 2016. En une seule journée – le 2 janvier – 47 personnes, dont le dignitaire chiite Nimr Baqr al-Nimr, ont été exécutées en Arabie saoudite après avoir été condamnées pour «terrorisme». L’année dernière, selon un décompte de l’AFP basé sur des chiffres officiels, le royaume avait en effet mis à mort 153 personnes, contre 87 en 2014. Les exécutions ont généralement lieu par décapitation au sabre et en public. Elles concernent aussi bien des Saoudiens que des étrangers.

Le 7 octobre 2011, le dignitaire chi’ite8 saoudien Nimr Baqer al-Nimr écrivait9 : « depuis notre naissance, nous sommes soumis à l’oppression, à l’intimidation, aux persécutions et à la terreur, au point que même les murs nous faisaient peur. Même les murs ! Y a-t-il quelqu’un qui n’a pas subi l’injustice et l’oppression dans ce pays ? J’ai plus de 50 ans, soit un demi-siècle. Depuis que je suis venu au monde, je ne me suis jamais senti en sécurité dans ce pays, nulle part, depuis mon enfance. Nous sommes continuellement accusés, menacés et agressés de toutes parts…  Nos poitrines resteront nues face à vos balles et nos mains resteront vides (sans arme), mais nos cœurs resteront emplis de foi… Nous n’avons qu’une alternative : vivre sur cette terre en hommes libres et dignes, ou y être enterrés avec les honneurs (après le martyre)… Nous ne cesserons de dénoncer votre oppression et de revendiquer nos droits ».

REVOLTES ARABES ET GUERRES DE SUCCESSION

Pris de court par la soudaineté et l’ampleur du mouvement social à l’origine des révoltes arabes (janvier 2011) – agglomérant plusieurs revendications composites touchant tant aux libertés civiles et politiques qu’aux conditions de subsistance économique, aux prébendes et corruptions des clientèles en place, les islamistes (Frères musulmans et Salafistes) se sont d’abord cantonnés à une posture d’attente. Depuis les années 1980, Riyad – ayant rompu avec la Confrérie égyptienne, coupable à ses yeux, d’ingérences dans les affaires intérieures du royaume – continuait à acheter sa tranquillité en soutenant toutes sortes d’officines salafistes, à peu près partout dans le monde, tandis que Doha offrait gracieusement asile, aides et logistique aux Frères musulmans. Aujourd’hui encore la chaîne de télévision satellitaire qatarie Al-Jazeera diffuse quotidiennement l’idéologie « frériste » en arabe, en anglais, en turc et en serbo-croate à plus de 80 millions de téléspectateurs.

Le 2 mai 2011, un commando de Navy-Seals neutralise Oussama Ben Laden dans son refuge pakistanais d’Abbottabad, installé à proximité des plus grandes écoles militaires du pays. Depuis plus de cinq ans, les services américains connaissent tout de la villégiature du chef d’Al-Qaïda. Le président Obama donne le feu vert à cette opération à ce moment-là parce que son administration veut éviter qu’Al-Qaïda ne récupère le mouvement de protestation qui s’est répandu dans l’ensemble du monde arabo-musulman. L’existence d’Al-Qaïda ne correspond plus à la nouvelle configuration des intérêts américains toujours portés à favoriser la promotion des Frères musulmans. Les Départements d’Etat et de la Défense estiment que ces derniers sont en mesure d’apporter des réponses thermidoriennes appropriées aux révoltes arabes.

Doha exulte et Riyad s’adapte. Toujours est-il que ce choix s’avère désastreux : en juillet 2013, après un an de pouvoir frériste au Caire, trente millions d’Egyptiens descendent dans la rue, ouvrant la voie au retour des militaires ; en Tunisie Ennahdha doit quitter le pouvoir en laissant une situation économique apocalyptique ; la Libye implose après la brillante intervention militaire franco-britannique relayée par l’OTAN ; en Syrie les Frères et leurs alliés arabes et occidentaux ne parviennent pas à renverser un régime fortement appuyé par la Russie, l’Iran et le Hezbollah libanais ; enfin, au Yémen la rébellion des Houthi provoque l’intervention de l’armée saoudienne qui remet Al-Qaïda en selle…

Il n’est pas anodin de souligner que cette initiative revient principalement au ministre de la Défense Mohamed ben Salman Al-Saoud (MBS), second vice-premier Ministre. Il est aussi vice-prince héritier, mais derrière son concurrent Mohammed Ben Nayef ben Abdelaziz Al-Saoud (MBN), lui aussi vice-Premier ministre mais surtout prince héritier en premier. Lié aux grandes sociétés du complexe militaro-industriel américain et aux stratèges du Pentagone, MBN qui devrait logiquement succéder à l’actuel roi Salman, fait l’objet de toutes les attentions de son concurrent MBS. Ce dernier fait ainsi assaut de surenchères wahhabites sur tous les dossiers possibles – Yémen, opposants, minorités chi’ites et police religieuse – afin de convaincre le Conseil des Oulémas qu’il représente mieux l’avenir de la dynastie, sinon la survie du royaume que le prince héritier désigné MBN, « vendu aux américains », selon les dires de plusieurs fils des rois Fahd et Abdallah, soigneusement écartés de toutes responsabilités importantes.

Cette épuration ne résulte pas seulement de querelles de parentèles, ne vise pas uniquement l’accès à la rente et les prébendes qui vont avec, mais entend aussi exprimer sûrement la volonté du clan des Soudaïri – revenu au pouvoir dans le sillage du nouveau roi Salman – d’une rupture avec la politique des Tuwaïjri et des tribus Chammar du feu roi Abdallah. Ce dernier était d’autant plus suspect aux yeux des premiers, qu’il cherchait à établir un système d’évitements, sinon d’arrangements avec l’Iran, estimant – sans doute à juste tire – que l’Arabie avait tout à perdre, à moyen et plus long terme, d’une confrontation directe et permanente avec le grand voisin perse.

C’est dans ce contexte de guerre de successions toujours inabouties qu’intervient – en Irak – le schisme fondamental entre Al-Qaïda (canal historique) qui reste partisan du « jihad global », et la future organisation « Etat islamique » (Dae’ch), optant pour un « jihad de proximité » à prétention territoriale. Le 9 juin 2014, Dae’ch prend Mossoul, la deuxième ville d’Irak et proclame le Califat vingt jours plus tard. A l’origine, ce nouvel acteur est accueilli favorablement, sinon aidé, par Ankara, Riyad et Washington qui estime ainsi pouvoir « siphonner », selon les propres termes d’un haut responsable du Pentagone, « les légions d’Al-Qaïda au profit de jihadistes locaux plus facilement contrôlables… ». Mais avec la proclamation d’un califat, englobant La Mecque et Médine, et la décapitation médiatisée de plusieurs journalistes américains, les nouveaux venus s’avèrent vite incontrôlables. Les premières « frappes » américaines contre Dae’ch commencent officiellement le 7 août 2014 avant que ne s’organise une improbable coalition anti-Dae’ch dont les membres principaux poursuivent des objectifs très contradictoires…

Réconciliée avec les Frères musulmans, l’Arabie saoudite – du moins certains de ses grands bienfaiteurs – continue à soutenir allègrement les katibas d’Al-Qaïda, de Dae’ch, de Jabhat al-Nosra et des autres variantes armées d’un Islam radical qui s’inspirent majoritairement du wahhabisme, doctrine officielle de la monarchie. Bien-sûr, Riyad fait partie de la coalition contre Dae’ch – qui revendique plusieurs attentats contre des mosquées chi’ites du royaume… – et va même jusqu’à fabriquer une nouvelle coalition « arabe » contre l’ « Etat islamique », mais le cœur n’y est pas… et les services de renseignement les plus sérieux sont obligés de reconnaître que l’Arabie saoudite, en dépit de ses efforts de communication, ne change pas de politique !

Journal presque officiel du Quai d’Orsay, Le Monde attend les télégrammes diplomatiques révélés par Wikileaks et les enquêtes du New York Times pour écrire du bout de la plume que « l’Arabie finance le fondamentalisme sunnite à travers le monde »10. Mais il en faut plus pour faire plier le chef de la diplomatie française dont le nouveau credo est « qu’il ne faut pas confondre le wahhabisme saoudien avec le salafisme… ». Le 18 novembre dernier dans l’hémicycle parlementaire, Laurent Fabius réaffirme que « les accusations de financement des groupes jihadistes qui pèsent sur les pays du Golfe n’étaient pas avérées ! » Des propos déjà tenus par Manuel Valls, la veille sur les ondes de France Inter, quelques heures avant sa rencontre avec le Premier ministre du Qatar…

LA POLITIQUE « SUNNITE » DE LA FRANCE

Depuis plusieurs années, Paris profite des tensions Riyad/Washington liées aux progrès de l’accord sur le nucléaire iranien, afin de se positionner comme partenaire privilégié de l’Arabie saoudite. Cette diplomatie commerciale a fini par peser une cinquantaine de milliards de dollars au profit des grandes sociétés du CAC-40, selon le cumul de contrats effectifs et d’intentions annoncées. Le 10 octobre 2015, en marge d’un forum d’affaires franco-saoudien, Manuel Valls annonçait fièrement qu’il avait signé des « accords et des lettres d’intention » pour un volume d’affaires estimé à 10 milliards d’euros. Cette annonce concernait une trentaine de patrouilleurs rapides qui devaient être commandés à DCNS11 par Riyad avant la fin 2015. A ce jour, la commande n’a pas été confirmée de même que des annonces similaires concernant le domaine des satellites de télécommunications et d’observation.

Selon l’AFP, qui citait les services du Premier ministre, ces accords concerneraient aussi « les secteurs de l’énergie, la santé, l’agro-alimentaire, le maritime et les infrastructures ». Un de ces accords porterait sur la création d’un fonds saoudien dédié à l’investissement dans de petites et moyennes entreprises françaises, notamment dans le numérique et les énergies renouvelables, pour un montant de deux milliards d’euros. Dans le domaine de l’agro-alimentaire, l’embargo qui touchait la viande bovine française a été levé. Les sociétés françaises devraient ainsi pouvoir à nouveau exporter vers l’Arabie Saoudite, précisait encore Matignon. Un protocole d’accord a aussi été signé entre le Fonds souverain saoudien et le Laboratoire français du fractionnement et des biotechnologies (LFB) pour la création d’une usine de fractionnement de plasma en Arabie Saoudite. L’investissement saoudien s’élèverait à 900 millions d’euros. Des annonces ont également été faites dans le domaine des infrastructures, pour la gestion du réseau d’eau de Ryad (trois milliards d’euros), les transports urbains (notamment concernant le métro de Ryad pour un milliard d’euros) et la distribution de l’énergie dans la nouvelle cité économique de Jeddah (un milliard d’euros).

Mais pour l’instant – à l’image des annonces publiques de subventions d’Etat aux différents programmes des Nations unies, où il y a le plus souvent loin de la coupe aux lèvres – ces chiffres demeurent très virtuels : ainsi la finalisation du DONAS ( l’enveloppe saoudienne de trois milliards de dollars promise aux industries françaises de défense pour moderniser l’armée libanaise ) traîne depuis plus de trois ans, sans certitude de la voir pleinement aboutir un jour… Et comme un « économiste atterré » le souligne : « calmons-nous avec ces effets d’annonces mirifiques, parce qu’aujourd’hui, le niveau réel de notre volume d’affaires avec l’Arabie saoudite n’atteint pas 10% de celui de nos échanges avec la Belgique… »

Toujours est-il que si l’on parlait encore d’une « politique arabe » dans la France du général de Gaulle et celle de François Mitterrand, il n’est plus question désormais que de politique « sunnite » dans celle de François Hollande… A ce titre, Laurent Fabius s’est opposé jusqu’au dernier moment à la finalisation, pourtant annoncée, de l’accord sur le nucléaire iranien. Au nom de quels intérêts ? On se pose encore la question, demeurée à ce jour sans véritable réponse !

Quoiqu’il en soit, Paris a réagi plutôt mollement aux dernières exécutions saoudiennes qui ont révolté toute la planète. Dans une réaction antidatée du 2 janvier 2016 – il fallait attendre celle de Washington -, Paris a déploré l’usage de la peine de mort, sans condamner les exécutions saoudiennes… François Hollande réitère ainsi la faute politique qu’il avait commise lors des derniers bombardements israéliens sur Gaza, ne se souciant que de la sécurité d’Israël sans se préoccuper des victimes civiles palestiniennes ! Aucune allusion aux contrats d’armements français avec Riyad, alors qu’au même moment le ministre allemand de l’Economie déclare publiquement qu’il s’agit « d’être plus critique, à l’avenir, en matière d’exportation de matériels de défense à destination de ce pays ».

Bien qu’entouré de conseillers en communication permanente, le président de la République s’exprime ici à contre-courant d’une opinion française et internationale majoritaire, qui sait maintenant, peu ou prou, le rôle joué par la monarchie wahhabite dans l’expansion de l’Islam radical dont les médias dénoncent quotidiennement les méfaits depuis les derniers attentats du 13 novembre 2015. En dépit de cette évolution faisant que l’Arabie saoudite d’aujourd’hui est une « dictature moins protégée », sa survie institutionnelle n’en reste pas moins assurée pour les prochaines années à venir.

En effet, l’administration Obama finissante, comme le prochain président américain, démocrate ou républicain, ne pourront que scrupuleusement observer les tables du Pacte du Quincy, officiellement en vigueur jusqu’en 2065. Normaliser les relations avec un Iran en voie de modernisation est une chose, lui laisser un champ régional libre où il pourrait s’imposer comme la puissance dominante en est une autre… Même si les Etats-Unis privilégient le redéploiement de leurs intérêts stratégiques vers l’Asie-Pacifique et l’Asie centrale, ils ne peuvent se désengager totalement des Proche et Moyen-Orient et, surtout, permettre l’émergence d’un « croissant chi’ite » tant redouté par leurs alliés historiques.

Ainsi, Washington doit impérativement veiller à l’existence et à la pérennité d’un pôle sunnite suffisamment fort – s’organisant autour des pays du Conseil de coopération du Golfe et de l’Egypte – afin de contenir le retour de l’Iran chi’ite dans le concert des nations. De fait, et face aux dernières provocations saoudiennes, la diplomatie américaine joue la carte de la désescalade pour s’assurer aussi que Riyad n’anéantisse pas les discussions de paix engagées sur les dossiers syrien, irakien et yéménite. En définitive, et même « moins protégée… », la dictature wahhabite pourra continuer, longtemps encore, à se jouer du cynisme mercantile et des lâchetés des démocraties occidentales. Bonne année tout de même !

Richard Labévière
11 janvier 2016

1 Le pacte du Quincy a été signé le 14 février 1945 à bord du croiseur USS Quincy (CA-71) entre le roi Ibn Saoud, fondateur du royaume et le président américain Franklin Roosevelt de retour de la conférence de Yalta. Il comporte quatre volets principaux : la protection de l’Arabie saoudite fait partie des « intérêts vitaux » de Washington ; la stabilité de la péninsule Arabique et le leadership régional saoudien font aussi partie de ces « intérêts vitaux » ; en contrepartie, le royaume garantit l’essentiel de l’approvisionnement énergétique américain ; les autres clauses portent sur le partenariat économique, commercial et financier saoudo-américain ainsi que sur la non-ingérence occidentale dans les questions de politique intérieure saoudienne. La durée de l’accord était prévue pour être de 60 ans. Il a été renouvelé pour une même période en 2005 par le président George W. Bush.
2 Alain Chouet : Au cœur des services spéciaux. La menace islamiste : fausses pistes et vrais dangers. Editions La Découverte, 2011.
3 Xavier Raufer (direction) : Atlas de l’Islam radical. CNRS-Editions, 2007.
4 Pierre Conesa : Guide du petit djihadiste, à l’usage des adolescents, des parents, des enseignants et des gouvernants. Editions Fayard, 2015.
5 Richard Labévière : Les dollars de la terreur – Les Etats-Unis et les islamistes. Editions Grasset, 1998. Les Coulisses de la terreur. Editions Grasset, 2003. Vérités et mythologies du 11 septembre 2001. Nouveau-Monde Editions, 2011.
6 Zbigniew Brzezinski : Le Grand échiquier – L’Amérique et le reste du monde. Editions Bayard, 1997.
7 Paul Balta : Iran-Irak, une guerre de 5000 ans. Editions Anthropos/Economica, 1988.
8 Les Saoudiens de confession chi’ite représente environ 10% d’une population de 29 millions d’habitants.
9 Cité par Salah Lamrani : Exécution d’un clerc chi’ite au Moyen-Orient, conflits sectaires ou politiques ? 5 janvier 2016.
10 Arnaud Leparmentier : Nos alliés les Saoud. Le Monde du jeudi 26 novembre 2015.
11 DCNS est un groupe industriel français spécialisé dans l’industrie navale militaire, l’énergie nucléaire et les infrastructures marines. Le groupe emploie plus de 13 000 personnes à travers 10 pays. Société de droit privé détenue à hauteur de 64 % par l’État français, de 35 % par Thales et de 1 % par son personnel, DCNS est l’héritier des arsenaux français et de la Direction des Constructions et Armes Navales (DCAN), devenue la Direction des Constructions Navales (DCN) en 1991.

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Le roman arabe entre despotisme et violences – L’Orient Littéraire / Beyrouth

Le roman arabe entre despotisme et violences

Le roman libanais refait parler de lui avec l’attribution à Hassan Daoud du prix Naguib Mahfouz, décerné par l’Université américaine du Caire, et la parution, à l’occasion du Salon du livre arabe de Beyrouth, d’un bon nombre de romans signés par des vétérans du genre comme Élias Khoury, Rachid el-Daïf, Imane Humaydane ou Abbas Beydoun, sans oublier le Syrien Khaled Khalifa. L’actualité, entre despotisme et violences, y pèse de tout son poids.

Par Tarek Abi Samra
2016 – 01

Raconter l’indescriptible

 

Avec La Porte du soleil paru en 1998, Élias Khoury avait écrit l’épopée des Palestiniens du Liban : l’exode de 1948, l’installation dans des camps de réfugiés, et puis les années sanglantes de la guerre civile. Aujourd’hui, dans son nouveau roman Les Enfants du ghetto. Je m’appelle Adam (Awlad el-ghetto. Esmi Adam), Khoury ressuscite encore ce passé, mais pour le considérer sous un jour différent : plutôt que l’exode, les horreurs l’ayant immédiatement précédé ; au lieu du destin des réfugiés, celui de ceux restés en territoire ennemi.

 

Adam, narrateur éponyme du roman, est en train d’écrire sa vie mais ne sait comment s’y prendre. Son existence est si fragmentée qu’il lui est impossible d’en faire un récit un tant soit peu linéaire. Il ne peut que digresser, distordre la temporalité normale et fournir, d’un même événement, une multitude de versions, chacune étant souvent celle d’une personne différente. De plus, comme une poupée russe monstrueuse, chaque histoire relatée renferme une infinité d’autres à tel point qu’on a l’impression de pénétrer dans une machinerie gigantesque, détraquée, fabricant les récits en série. Bref, le style d’Adam est celui, bien connu, de Khoury lui-même, style serpentin parfaitement maîtrisé qu’il ne perd jamais le lecteur malgré les innombrables contorsions que celui-ci doit faire subir à son esprit.

 

Ainsi, par bribes, l’on apprend l’histoire d’Adam. Ses origines se confondent avec la Nakba, puisqu’il fut le premier nouveau-né du ghetto arabe de Lydda, établi par l’armée israélienne qui encercla de fils de fer barbelés une partie de cette ville palestinienne après avoir massacré des centaines d’habitants et expulsé des dizaines de milliers. Ceux qui y sont demeurés, les prisonniers du ghetto, vécurent leurs premiers jours au milieu de cadavres putréfiés, souffrant de faim et de soif. Les troupes israéliennes les obligèrent à creuser des fosses profondes et à y enterrer leurs morts. Enfin, après un mois de cet abominable labeur, ils leur ordonnèrent de brûler ce qui restait de cadavres ; les Palestiniens s’y employèrent, se transformant en une sorte de SonderKommando, ces juifs forcés par les nazis à se débarrasser des cadavres des victimes des chambres à gaz.

 

Après son enfance à Lydda, puis son adolescence à Haïfa, Adam quitte sa maison à l’âge de quinze ans et se forge, en quelques années, une nouvelle identité : il se présente désormais comme un juif, le fils d’un survivant du ghetto de Varsovie, et travaille comme critique de musique dans un quotidien hébreu. Une déception amoureuse le pousse à émigrer aux États-Unis où il travaille dans un restaurant de falafel. Il pense avoir réussi à bâtir une nouvelle existence, mais son passé revient le hanter. Il décide alors d’écrire sa vie.

 

Le livre que nous lisons est en effet le manuscrit d’Adam que Khoury, dans son introduction, prétend avoir acquis par hasard et qu’il décida ensuite de publier. La seconde partie du manuscrit relate les événements que nous venons de résumer. Toutefois, la première – une soixantaine de pages – est un roman avorté dans lequel Adam a tenté de raconter l’histoire du poète omeyyade Waddah al-Yaman qui garda un silence absolu lorsque le calife le tua en le jetant dans un puits. D’abord, Adam voit dans le silence du poète une métaphore du silence des Palestiniens à propos de certaines tragédies qu’ils ont subies, mais il délaisse ensuite ce projet de roman, considérant l’écriture symbolique comme impuissante à dire la vérité.

 

Toute cette architecture disloquée du roman de Khoury, son style excessivement digressif, ainsi que le jeu de miroirs entre l’auteur et le narrateur sont au service d’une question fondamentale : comment raconter des horreurs dont les victimes ont choisi le silence ? La réponse réside peut-être dans le recours à l’univers romanesque, qui permet la coexistence de récits contradictoires de même que leur prolifération à l’infini. À l’avant-dernière page, Adam dit : « Shéhérazade avait découvert que le monde des récits est le monde réel ; les récits ne sont pas un substitut à la vie, mais la vie elle-même. »

Activités à venir Janvier 2016

 

 

Activités à venir

najjar Lundi 11Janvier à 19h à la librairie arabe l’Olivier     

Rencontre avec Alexandre Najjar autour du

« Dictionnaire amoureux du Liban » et de « Khalil Gibran »

Homme de convictions, Alexandre Najjar s’est investi pour les causes qui lui tenaient à coeur. Après avoir étudié au Liban au collège Notre Dame de Jamhour, il se rend à Paris où il suit les….                                                                                                                                                                 [plus d’infos….  ] 

Mercredi 13 janvier à 18h30 à la librairie arabe l’Olivier

Café sagesses de l’Humanité

avec le Grand Rabin Marc Raphael Guedj, le pasteur Vincent Schmid, Dr. Alexandre Ahmadi psychanaliste jungien et spécialiste de la mystique musulmane.   

 Vernissage de Waha: Exposition de peinture, Hussain Tarabie et Ali Omar @ ICAM-L'ibrairie de l'Olivier | Genève | Genève | Switzerland  Jeudi 14 janvier à 18h à la librairie arabe l’Olivier

Vernissage de l’Exposition WAHA

Peintures de Hussein Tarabie et Omar Ali (Syrie)

Waha est une initiative, lancée à Istanbul en 2015 par des créateurs et des artistes syriens et suisses, qui a pour but de promouvoir le travail de jeunes artistes du Proche-Orient. Après une première exposition..                                       [plus d’infos….]

  Vendredi 15 janvier de 18h30 à 21h30 à la Librairie arabe l’Olivier

Formation de Mohammed Taleb:

Histoire et présence du nationalisme révolutionnaire arabe

Notre objectif est, non pas d’abord, de diffuser des informations à caractère historique sur cette civilisation, mais d’offrir des clés d’analyses, des grilles d’interprétation. Ce qui nous intéresse est de poser la Question du sens. La surinformation que procure les nouvelles technologies de la communication a ceci de fâcheux …..[plus d’infos….]

 Samedi 16 janvier de 9h30 à 12h30 à la Librairie arabe l’Olivier

Formation de Mohammed Taleb:

Hommage à Edward Said. Une contribution palestinienne,arabe, universelle au réenchantement du monde

                                                                                     plus d’infos….]

 Concert + apéro vernissage CD "Terra Aria" ZATAR @ Librairie arabe l'Olivier | Genève | Genève | Switzerland Samedi 16 janvier dès 18h30 à la Librairie arabe l’Olivier

Concert + Vernissage CD  « TERRA ARIA »  ZATAR

Du nom de ce mélange d’épice où le Moyen-Orient trempe son pain imbibé d’huile d’olive, ZATAR aime brasser les saveurs et les émotions. Le quartette propose un cocktail détonant de compositions personnelles, de pièces du…………….[plus d’infos…]

 Cours de cuisine libanaise végétarienne avec Samia @ Librairie arabe l'Olivier | Genève | Genève | Switzerland  Samedi 23 janvier de 10h à 13h à la Librairie arabe l’Olivier

Cours de cuisine végétarienne avec Samia

Après le succès des derniers cours et à la demande de plusieurs d’entre vous. Samia continue à vous faire voyager à travers sa cuisine et elle vous propose: Chaque mois un cours! Un cours de…                                                                    plus d’infos…]

 Concert avec l'Orchestre National de Palestine et le choeur Singkreis Wohlen/BE @ Salle Frank Martin, Genève | Genève | Genève | Switzerland Mardi 26 janvier à 20h30  Salle Frank Martin

Concert avec l’Orchestre National de Palestine 

et Singkreis Wohlen BE.

Bach, oratorio de Noël

Mariam Tamari, Soprano / Dieter Wagner, ténor/ Martin Snell, basse

                                                                                             [plus d’infos…]

 Un grand merci à nos soutiens pour la confiance qu’ils nous accordent

 
 

 

 

100 idées reçues sur l’Islam – Imam Hassen Chalghoumi

Jihad, fatwa, frères musulmans, islamistes, salafistes… Des mots qui circulent partout, inondent l’actualité. On se perd dans ce vocabulaire, tant utilisé par Daech, Aqmi et les médias, que sur Internet, cette belle avancée de notre siècle qui est aussi source de dérives. N’importe qui s’octroie le droit d’interpréter la langue sacrée d’Allah, donnant de fausses définitions et des explications douteuses, dangereuses. Des sites en profitent et  » hypnotisent  » certains de nos enfants jusqu’à leur arrivée fatale en Syrie. Depuis les attentats de Charlie Hebdo, nous portons tous le deuil. J’ai pris position contre ces crimes qui menacent nos sociétés, nos libertés et nos vies. Le terrorisme a pris l’islam et la communauté musulmane en otage, affirmant agir au nom d’Allah, s’appropriant les paroles saintes du Coran, les détournant de leur sens originel. Ce livre rétablit la vérité. Il y a urgence. Si les intégristes tuent en son nom, rappelons que l’islam prône paix, tolérance et respect. Nous, Français musulmans, déclarons au monde ce que le Coran a révélé au prophète Muhammed voilà quatorze siècles :  » Si tu n’es pas mon frère dans la religion, tu es mon frère dans l’humanité.  » H. C.

Nos larmes ont la même couleur

Elles connaissent toutes deux la douleur fulgurante de la perte d’un enfant. Robi Damelin est israélienne. En 2002, son fils David, 28 ans, est abattu par un sniper alors qu’il effectue sa période de réserve (affectation suivant le service militaire, obligatoire pour tout Israélien actif) dans les territoires palestiniens. Mahmoud, Palestinien de 17 ans, fils de Bushra Awad, est, quant à lui, tué en 2008 par des soldats israéliens dans son village de Cisjordanie. Ces deux femmes devraient se haïr. Pourtant, elles militent ensemble au sein du Cercle des parents-Forum des familles, une association qui rassemble des familles israéliennes et palestiniennes endeuillées par le conflit. Si ceux qui ont payé le prix fort – la mort d’un être aimé – sont capables d’empathie et de dialogue avec les éplorés du camp adverse, sans chercher vengeance, alors tout semble encore possible… Journaliste à l’hebdomadaireLa Vie depuis une quinzaine d’années, Anne Guion travaille comme reporter à l’international. Elle y suit notamment l’actualité en Afrique et en Israël-Palestine où elle se rend régulièrement. C’est lors de l’un de ses reportages qu’elle a découvert l’association du Cercle des parents-Forum des familles. 5 % des bénéfices de la vente des ouvrages de la collection  » Pour un monde meilleur  » seront reversés à des actions sociales et solidaires.

Ghassan Salameh – Le temps des tourmentes

Ghassan SALAMEH

Le Temps des Tourmentes

Il y a guère cinq ans, une nouvelle ère de l’histoire de cette région commençait, une ère de transformations dues à des raisons différentes, transformations compliquées en termes de déroulement, transformations qui se répandent géographiquement comme une infection contagieuse, transformations tragiques qui causent la chute de l’humanité. Beaucoup d’encre fut versée sur le sujet, et plusieurs théories explicatives apparurent. Je ne pourrai pas, bien sûr, durant ces quelques minutes limitées, en discuter de manière exhaustive. Je me contenterai donc de faire une simple contribution déjà partiellement reconnue sur ses développements actuels et son sort.

La première question est la suivante : la région arabe est-elle réellement victime d’un complot, comme je l’ai lu et entendu ? Si oui, qui est la cible de ce complot, et quelle en est le but ? Je suis certain que ce qui se passe ne peut absolument pas être considéré du point de vue d’un complot, mais ceci n’en nie pas la possibilité. La région est en proie à une explosion interne de toutes ses composantes sociales, politiques, économiques, et idéologiques adoptées depuis bien longtemps, et que la région ne monopolise pas. Néanmoins, l’emplacement exceptionnel de la région dans la politique internationale poussa plusieurs acteurs régionaux et internationaux à tenter d’en profiter, que ce soit pour l’avancement de leurs propres intérêts ou le progrès de leurs projets. Il est donc nécessaire d’éviter de tomber dans une relation causale chamboulée en considérant les tentatives des acteurs principaux de s’adapter aux transformations de la région, de se protéger de leurs retombées, ou d’en profiter, en tant que preuve de leur rôle dans leur création.

Parmi les causes de l’explosion de ces événements actuels dans notre monde arabe, nous comptons une certaine faiblesse des régimes autoritaires ; certains sont même à bout de forces. Notre région demeura immuable face à ce qu’on nomme « troisième vague de démocratie, » qui se propagea depuis le Sud de l’Europe durant les années soixante-dix, pour passer ensuite à l’Amérique Latine, puis l’Europe Centrale et l’Europe de l’Est, et enfin à certains pays parsemés sur les autres continents. Cette vague entraîna une situation sans précédent dans l’histoire du monde, à savoir : un passage, dans la plupart des pays du monde, de différents types de tyrannie à un mélange de pluralité politique et régimes d’économie marchande, animés pas plusieurs moteurs tels le mouvement de mondialisation financière, la fin de la guerre froide et la bipolarité que ceci a entraîné, et la révolution énorme dans la communication. Par conséquent, à la fin du siècle dernier, environ 120 pays des 193 du monde commencèrent à être considérés comme étant des pays démocratiques. Mais la région arabe demeurait hors de cette transformation, à tel point que certains écrivirent des ouvrages entiers sur ce qu’ils nommaient « l’exception arabe, » pour expliquer l’abstention de participation au mouvement démocratique mondial de nos sociétés. Nous pourrions donc considérer le phénomène baptisé « printemps arabe », appellation qui tenterait d’expliquer que ce phénomène avait tardé, une sorte de réplique secondaire lointaine à cette vague de démocratie, qui eut comme résultat l’entrée titubante de notre région dans le mouvement de libération du joug de la tyrannie. L’ironie du sort voulut que le mouvement contestataire arabe rejoigne la vague mondiale au moment ou cette dernière connut une sorte de ralentissement, de déclin, avec la résurgence de diverses formes de tyrannie et d’autoritarisme dans des pays qui semblaient aller de l’avant vers la pluralité politique. Les éléments démarquant ces cas, surtout en Egypte, au Yémen, et en Lybie, furent que la protestation contre l’autoritarisme, qui avait était mise en sourdine pendant des décennies, n’explosa vraiment que le jour où le peuple apprit que leurs gouverneurs avaient décidé de léguer l’état à leurs fils, comme si un état était une propriété privée. Ce jour-là, une élite qui appuyait le gouverneur s’en sépara, surtout au sein de l’armée, et le laissa seul face aux protestataires, avec sa famille et les membres de son entourage proche.

Deuxièmement, d’autres raisons existent, comme le fait que plusieurs régimes arabes avaient décidé de tenter de profiter de cette ouverture économique sur le processus de la mondialisation pour renforcer le commerce et attirer des investissements et du tourisme, sans remarquer que l’entrée dans le marché international ne pourrait se faire sans projections sur leurs situations politiques, comme la perte progressive de leur contrôle sur l’économie nationale, la nécessité de respecter les règles des opérations de privatisation, le ressentiment naturel du peuple vis-à-vis des politiques de non-subvention des produits de consommation, des risques engendré par la monopolisation des autorités des capacités économiques, ou des conséquences de l’acceptation de certaines conditions posées par le Fonds Monétaire International, par l’Organisation Mondiale du Commerce, ou d’autres bailleurs de fonds, sur la souveraineté nationale. Ceci est pour dire que le mouvement actuel est une révolte contre la mauvaise distribution des richesses émergentes, ainsi qu’une protestation contre la monopolisation du pouvoir. D’ici, nous pouvons comprendre ce slogan scandé durant des manifestations, « Un Emirat ou un Commerce », refusant la transformation des sièges de pouvoir en un moyen d’enrichissement des gouverneurs, de leurs proches, et de leurs partisans.

La troisième raison est cette révolution technologique qui débuta il y a environ trois décennies ; nous en vivons encore les périples, et elle est le résultat des efforts politiques et sociaux étendus sur plus d’une génération, révolution encore plus puissante et vaste que la révolution industrielle d’il y a plus d’un siècle. Cette révolution accélérée des moyens de communication rend la mobilisation populaire plus facile, et la transmission d’informations plus rapide. Ceci signifie qu’une manifestation bondée pourrait commencer par un message sur Twitter, qu’un scandale énorme pourrait se répandre comme une traînée de poudre en une ou deux phrases sur Facebook. L’expression d’opinions est alors à la portée de tous, non seulement des élites, ce qui a mené à la prolifération des fatwas, des avis, et des appels sans aucune surveillance, et sans que ceux qui les lancent ne pensent aux conséquences de leurs prises de positions. Cette révolution engendra plusieurs cas de communication, interaction, et solidarité transfrontalières entre des individus et des communautés critiquant une religion, une confession, ou le même courant de pensée, aux dépens de la monopolisation des états des champs de pensée et de culture, qu’ils contrôlaient à leur guise. Le défi des conditions en vigueur se propagea d’une manière contagieuse quand la communication se transforma en identification, à savoir l’emprunt d’un slogan, d’un hymne, de mécanismes provenant d’autres pays. La révolution technologique ouvrit les portes devant les mouvements islamiques politisés, dont la force avait été auparavant réprimée et assiégée. Elle brisa ses menottes et envahit rapidement une grande part des marchés intellectuels et politiques arabes.

L’environnement joua aussi un rôle considérable dans la déflagration de ce « printemps arabe », surtout en ce qui concerne la rupture soudaine de l’équilibre qui régnait auparavant entre la croissance démographique et les ressources disponibles. Des exemples clairs de cela se font voir en Egypte, où une croissance démographie mena à des crises de vie et de logements étouffantes, ainsi qu’en Syrie, où la croissance démographique atteignit les plus hauts niveaux mondiaux au cours des quatre décennies passées, où des conflits internes explosaient dû au manque d’eau dans la péninsule, menant à l’émigration de plus de 3 millions de syriens dans les années qui précédaient la crise actuelle. Les facteurs environnementaux atteignirent leur pic au Yémen, où la contradiction entre le boom démographique et les ressources naturelles disponibles, surtout l’eau, arrivèrent à leur paroxysme. Il est logique de penser que ces données de base ne changeront pas avant la découverte d’une solution politique stable dans chacun de ces pays.

Le pétrole joua aussi un rôle considérable dans cette situation : l’élévation des prix du pétrole et du gaz au cours de la première décennie du 21ème siècle aboutit à un surplus énorme, décuplant ainsi le pouvoir des pays pétroliers à influencer le cours des choses au sein d’autres pays, tandis que les pays arabes importateurs de pétrole perdirent une grande part de leur capacité financière. Ceci rendit la contradiction entre les capacités à portée des pays pétroliers et celles de leurs voisins flagrante, ouvrant ainsi devant les pays pétroliers de grandes avenues d’influence sur le contenu politique et les décisions de la ligue arabe. L’effondrement  des prix du pétrole que nous voyons aujourd’hui pourrait jouer un rôle assez contraire en termes d’affaiblissement des pays pétroliers, en les privant de l’outil politique de leur influence interne et régionale, afin que l’étincelle de protestation puisse les gagner.

Ce sont donc des transformations profondes du tissu social arabe, difficiles à cerner par une lecture purement politique ou conspirative. Il faut dire qu’il existe une sorte de relation dialectique qui naquit rapidement entre les troubles internes et les interventions externes ; les troubles commencèrent à exiger des interventions, qui, à leur tour, animaient les troubles. Il est difficile donc d’imaginer qu’une décision fut prise quelque part dans le monde pour faire éclater la région. Ce qui est plus important est qu’il est aussi difficile d’imaginer que les solutions politiques aux crises actuelles seront suffisantes pour résoudre leurs causes profondes, même s’il est toujours nécessaire d’œuvrer pour trouver ces solutions afin de diminuer les taux de violence et renvoyer ces sociétés à un statut de paix civile. Pour ceci, l’impression dominante est que la situation en vigueur est fragile, même pour les pays qui semblent avoir retrouvé une mesure de stabilité, comme la Tunisie et l’Egypte, et d’autres pays qui ont réussi à garder leur distance de ces troubles jusqu’à aujourd’hui.

Ces facteurs se mélangèrent pour créer de réels mouvements populaires. Néanmoins, la situation délicate de la région poussa différents pouvoirs étranger à influencer le cours des mouvements. Pour résumer ce qui se passe à ce niveau, je dirais qu’il y a un genre d’adaptation de sécurité qui accompagne la mondialisation de l’économie. Les pays de la région font désormais part du marché mondial, mais leur situation de sécurité est de plus en plus influencée par les pays avoisinants.

Ce qui distingue la période actuelle, à mon avis, est une faiblesse relative devant l’influence des grands pays, en échange d’une croissance tangible de l’influence des pays régionaux. J’entends beaucoup de critiques sur la manière dont Obama se débat dans les sujets qui touchent à nos pays, mais je trouve, au contraire, que sa méthodologie est claire : il veut que les Etats Unis évitent d’intervenir autant que possible dans les affaires de cette région, surtout sur le plan militaire. Il considère que son pays n’a plus besoin du pétrole de la région, que la Russie, son ennemi d’antan, ne parvient pas à contrôler sa destinée, qu’Israël a assez profité des Etats Unis, et que les alliés traditionnels des Etats Unis doivent se débrouiller tant bien que mal sans qu’il n’introduise son pays dans ces affaires comme cela se faisait. Plus important que cela est qu’il considère que son pays a mené des guerres coûteuses et qui se sont avérées être inutiles, ou même néfastes, sous les mandats de ses prédécesseurs, en Irak et en Afghanistan. L’Histoire mentionnera qu’il n’est intervenu en Lybie que quand les Européens menèrent l’attaque, et ce pour une période très limitée, et qu’il n’est intervenu directement en Syrie et en Irak que quand la question de l’Etat Islamique (EI) s’est exacerbée, alors qu’il avait réussi à éviter une nouvelle guerre avec Iran à travers l’atteinte d’un accord sur le programme nucléaire de ce dernier. Il considère également que l’intérêt national des Etats Unis est plus menacé en Asie que dans notre région, d’où son orientation vers l’Extrême Orient. Toutes ces considérations sont publiques et réitérées, et nous devons les accepter en tant que doctrine, en quelque sorte, malgré le fait que les adversaires d’Obama au sein des Etats Unis les refusent, malgré l’incrédulité des ennemis des Etats Unis, et malgré le ressentiment qu’elles font surgir chez les alliés des Etats Unis dans notre région. Une question se pose ici : après qu’Obama ait quitté la Maison Blanche, les Etats Unis vont-ils fermer la porte devant cette séparation de recul, ou vont-ils la poursuivre ? Mon intuition me dit que le retrait des guerres chaudes du monde reçoit encore un soutien de l’opinion publique américaine, malgré les blessures profondes laissées par l’élargissement du phénomène de l’EI, et l’intervention militaire directe russe en Syrie ; les pressions exercées sur Obama se sont accrues pour d’avantage d’intervention directe en Syrie et en Iraq, malgré son abstention catégorique de cela pendant les cinq années précédentes.

Cette absence de volonté américaine s’accompagnée d’une érosion des capacités d’autres pays de l’Occident. Le système international progressivement mis en place par l’Ouest au cours des cinq années précédentes, s’effrite aujourd’hui sous nos yeux, sans qu’il n’y ait un vrai consensus entre les pays émergents sur un système qui le remplacerait. Nous sommes au crépuscule de cette ère, et la lumière de l’Ouest décline en termes d’institutions, de valeurs, et de règles qu’il avait disséminées de par le monde, sans que la lumière de l’aube à venir ne se profile à l’horizon. La Chine est prise par le renforcement de sa position entre les pays qui l’entourent, la Russie agit essentiellement comme force régionale en Ukraine, dans le Caucase, et dans notre région aussi, la considérant en tant que région avoisinante dans laquelle se trouvent des intérêts et des risques à sa sécurité nationale, alors que des pays tels l’Inde, le Brésil, le Nigéria, l’Indonésie, et Iran cherchent, avec beaucoup de difficultés et en commettant des erreurs fréquentes, à ériger les composantes personnelles nécessaires pour qu’ils deviennent de nouveaux pôles. Ceci nous fait sentir que la formule internationale que l’Ouest avait architecturée touche à sa fin, sans qu’il n’y ait une nouvelle formule.

Il est naturel de s’arrêter sur la Russie, surtout après son intervention directe dans la guerre syrienne. La Russie tente, bien évidemment, de redorer son blason après un quart de siècle de perte de pouvoir, mais ses leaders sont assez réalistes pour savoir que le monde ne reviendra pas au système international bipolaire de l’avant-1989. On pourrait dire que la Chine tente de renforcer son hégémonie sur son environnement direct en tant qu’étape préliminaire nécessaire à sa transformation en pouvoir international, alors que la Russie tente de promouvoir son emplacement dans son environnement immédiat en compensation pour un emplacement international passé –elle ne se fait pas d’illusion de pouvoir le récupérer. Moscou considère que nous faisons partie de cet environnement, ce qui signifie que notre région constitue une source de danger et un espace d’opportunités pour la Russie, tout comme d’anciens pays européens, contrairement aux Etats Unis ou la Chine, qui ne sont pas limitrophes à notre région. Ceci nous aide à comprendre la quête de Moscou à renforcer sa position en Syrie et son ouverture vers différents pays de la région, comme l’Egypte, l’Irak, et mêmes les pays du Golfe. Ironiquement, la Russie, de manière diamétralement opposée à ce qui se passait durant la Guerre Froide, se considère protectrice des régimes en vigueur, accusant les Etats Unis de jouer un rôle direct dans la stimulation des mouvements et la déstabilisation des régimes, déclaration qui fait écho aujourd’hui dans plusieurs capitales de la région. Ironiquement aussi, la Russie commence à considérer son rôle de protecteur des minorités dans notre région, trouvant à redire à la France et d’autres pays de l’Ouest qui ont abandonné ce rôle, et primant ses intérêts commerciaux devant tout autre considération, ce qui la pousse à se prêter au jeu des sunnites, où qu’ils soient dans les pays de la région.

Les organisations internationales constituent une part importante du legs de l’époque précédente de politique mondiale. Nous aurions pu imaginer l’Organisation des Nations Unies accompagnant le succès de ce grand passage d’un système international à l’autre, mais le rêve des années post-Guerre Froide est en ruines, et l’ONU aujourd’hui ne peut pas jouer le rôle d’incubateur pour le remplacement d’un système mondial par un autre. Premièrement, l’ONU encontre une difficulté organique quant au traitement des conflits civils qui éclatent partout, elle qui œuvra longtemps pour la résolution des guerres entre, et non pas à l’intérieur, des pays. Il est également difficile pour l’organisation de trouver un financement suffisant pour les opérations de paix, telles celles entreprises par les agences d’aide humanitaire qui lui sont annexées ou en émanent. Plusieurs événements récents ont empiré l’impuissance de l’ONU, comme la résurgence des tensions dans la relation entre la Russie et l’Ouest qui a grandement affecté les travaux du Conseil de Sécurité ; en effet, ses décisions sur la Lybie furent confuses au sein des interprétations différentes des résolutions, et son impuissance flagrante apparut face à la situation en Syrie, sans oublier un leadership onusien qui manque de prestige et de respect, au point que la Conférence de Vienne sur la Syrie faillit se tenir en l’absence de toute organisation onusienne jusqu’au dernier moment.

Tout cela mena à une sorte de situation contradictoire, accompagné par l’intégration de la région dans des mécanismes de mondialisation financière et économique, et l’accroissement du rôle sécuritaire et politique des pays de la région. L’Iran était un pionnier dans ce contexte. En réalité, il y a plus d’un Iran. Il y a l’état-nation, héritier d’un empire qui penchait traditionnellement, et penche toujours vers l’expansion dans son milieu ; il y a l’état chiite qui cherche à profiter des liens de cette confession pour mobiliser des partisans partout sur la mappe chiite ; il y a le pays de la révolution islamique qui cherche à contrôler le parcours de l’Islam politique, toutes confessions confondues ; il y a l’Iran ambitieux d’un rôle international qui contribuerait à formuler l’ère post-Ouest. A l’aube de cette ère, ce pays s’est fait des illusions aux plus hauts niveaux, croyant que ce qui se passe aujourd’hui lui profite de tous les côtés ; son guide suprême a même décrit la période actuelle comme « printemps islamique », le soutenant, ou plutôt, incitant à cela. Mais la contagion entre la Tunisie, l’Egypte, la Lybie, l’Irak, la Syrie, et le Yémen l’a confus. L’Iran a donc glissé vers une interprétation plus étroite, dans laquelle les considérations imposantes ont triomphé de l’enthousiasme passager envers ce « printemps » dont les risques lui paraissent plus importants que les promesses.

Les leaders de la Turquie, quant à eux, pénétrèrent très tôt dans une illusion similaire, qui nous a coûté et qui leur coûte beaucoup. Les théories stratégiques de Davutoglu fusionnèrent avec les ambitions personnelles d’Erdogan et les efforts de l’économie turque en vue de l’exportation, créant ainsi un néo-ottomanisme actif qui entra dans cette région premièrement par la voie économique, avant de chercher à recréer la disposition politique et idéologique arabe avec un contenu confessionnel et partisan clair, surtout de par sa coopération avec le mouvement des Frères Musulmans. Mais le vent de la région a soufflé contre les désirs des turcs : les Frères Musulmans ont été banni du pouvoir en Egypte, le projet de renversement des régimes syrien et irakien a échoué, la situation en Lybie a explosé, et le factionnalisme s’est infiltré à nouveau à l’intérieur de la Turquie, qui est plus compliquée qu’on ne le pense en termes d’ethnicités et de confessions. La Turquie a dû donc imiter l’Iran et reformuler son projet pour que la dimension confessionnelle le remporte sur la dimension politique, chose qu’elle ne s’est pas abstenue de faire.

Quant à Israël, il chantait faux, comme d’habitude. Il est normal que l’élite israélienne se sente réconfortée par l’effondrement du pouvoir de tellement de pays arabes, et le rapprochement d’autres pays arabes d’Israël, sans mentionner la chute dramatique de l’intérêt arabe en la cause palestinienne. Mais dire qu’Israël est le seul pays à profiter de ces transformations révèle une illusion naïve que ces pays arabes se tenaient debout en solidarité pour libérer la Palestine avant l’apparition de ces événements. Ceci n’est pas pour dire qu’Israël ne serait pas heureux de voir les pays avoisinants arriver à bout de leurs forces, mais le danger qui le guettait ne provenant pas de ces pays ; au contraire, l’épuisement de ces pays, surtouts ceux avec lesquels des accords de paix sont ratifiés, ne sert pas nécessairement ses intérêts. De plus, les tentatives israéliennes de bâtir des liens avec les pays du Golfe pour empêcher la ratification de l’accord nucléaire iranien ne furent pas réussies. Pour cela, dans la mesure où nous pouvons comprendre le développement d’idées au sein de l’élite israélienne preneuse de décisions, les transformations se passant dans la région engendrent des émotions mixtes, contradictoires, et elles décuplent même la paranoïa du danger existentiel au lieu de calmer ces craintes.

Les pays arabes qui ne furent pas frappés par cette vague contagieuse de protestation considérèrent, en partie, qu’une intervention directe ou indirecte dans les affaires des pays qui en sont affectés, en termes de financement, armement, ou emploi de leurs capacités diplomatiques et médiatiques, leur serait bénéfique. En effet, nous avons vu un engagement tangible des pays du Golfe sur plusieurs scènes enflammées. Mais ces interventions, loin d’être décisives, n’eurent aucun succès. Les raisons de cet échec sont nombreuses ; en effet, l’argent ne suffit pas pour changer le cours des choses, un cadre diplomatique et politique est nécessaire pour employer cet argent positivement. De plus, il devient difficile de trouver cet argent dû à la baisse des prix du pétrole, d’un côté, et du nombre croissant de scènes enflammées de l’autre. Enfin, les relations entre les pays du Golfe eux-mêmes sont caractérisées pas une concurrence, des désaccords, et même des chocs, bien plus que par l’accord et la solidarité. Ceci aurait entravé la politique d’un certain pays du Golfe qui serait en opposition avec un autre, comme ce fut le cas de l’Egypte ou de la Lybie, par exemple.

Les pays du Golfe ne peuvent se mettre d’accord précisément sur l’Islam politique, et ceci est le plus important. En réalité, la religion joue des rôles différents dans le domaine public. En effet, elle est une doctrine qui croit en une métaphysique active, dans laquelle plusieurs débats sont tenus en permanence sur les interprétations et la jurisprudence ; elle est un ensemble d’institutions œuvrant pour préserver cette doctrine ; elle est une langue de mobilisation à laquelle certains ont recours quand les mots politiques font faillite ; elle est un marché de compétitivité entre les religions, les confessions, et les courants. Tous ces emplois de la religion firent irruption sur scène durant cette période, et les chemins de cette religion choisis par les pays furent assez nombreux. En effet, certains tentèrent d’employer un de ses courants pour leurs propres intérêts, d’autres adoptèrent un courant compétiteur, et certains décidèrent que leurs priorités se rapportaient à la restitution de l’Islam politique à sa bouteille. En contrepartie, certains mouvements islamiques décidèrent eux-mêmes de garder leurs stratégies indépendantes des pays qui les soutenaient, et tentèrent d’intégrer ces pays autant que possible dans leurs plans pour accéder au pouvoir, chose qui leur semblait aisée. Aujourd’hui, l’EI est le plus grand exemple de cet enchevêtrement entre les divers emplois de la religion et des projets purement politiques des groupes de combattants, et les politiques des états qui cherchent des outils pour arriver à leurs objectifs. Personnellement, je trouve que cet essor religieux, qui débuta il y a environ un demi-siècle, spécifiquement au lendemain de la défaite de 1967, souffre aujourd’hui d’une mesure de ralentissement ; en contrepartie, cet essor fiévreux ou doctrinal, processus assez différent du phénomène religieux et qui empira suivant l’invasion de l’Irak en 2003, n’a pas encore atteint son paroxysme.

Si cette évaluation rapide de l’ère profondément troublée que nous vivons aujourd’hui est correcte, son premier résultat serait que nous ne somme pas proche de la clôture de cette ère, ou de l’annonciation de sa fin. Nous devrons donc attendre des années, non pas des semaines ou des mois, avant que cette région ne se stabilise à nouveau. De plus, les facteurs structurels qui éclatent aujourd’hui signifient également que cette parcelle d’instabilité pourrait s’élargir, tout comme elle pourrait se rapetisser. Essentiellement, ceci signifie que les solutions politiques et diplomatiques, malgré leur urgence, demeurent moins pressantes que les défis existentiels auxquels font face les peuples de la région.

Quand nous faisons face à des défis existentiels, nous glissons sans le savoir vers une question complémentaire : l’existence de qui ? Qui somme nous pour réclamer une vérité sur notre survie de personne ? Nous glissons à nouveaux vers un questionnement sur les sorts des pays dont les frontières nous furent tracées depuis un quart de siècle, qui nous semble aujourd’hui être menacés par ces lames qui découpent et recollent la carte de notre région. N’avons-nous pas prévenu de l’enfouissement des Accords Sykes-Picot ? Ne voyons-nous pas la croissance d’une entité, ou plutôt d’entités kurdes de part et d’autre ? Ne pouvons-nous pas réaliser l’objectif du nettoyage ethnique, religion, et confessionnelle qui se déroule sous nos yeux ? J’entends des murmures sur la réunification d’un côté, la division de l’autre, alors qu’on invoque la protection de Dieu de ses horreurs terribles de près et de loin. Personnellement, je trouve que les pays récents sont une création humaine, malgré toutes les tentatives de les diviniser, et que, comme toutes les créations humaines, sont susceptibles de s’élargir, de se diviser, de se réunifier, et de s’intégrer dans d’autres –je dirais même que ne pas faire cela conduirait à leur extinction. Pour cette raison, nous devons nous extirper de cette théologie chronique et considérer ce que nous voyons, pour pouvoir nous poser des questions : le Pakistan a-t-il vraiment bénéficié de sa séparation de l’Inde ? Le Nord de Chypre a-t-il vraiment bénéficié de sa séparation du Sud, le Sud du Soudan de son Nord ? Surtout que, dans le dernier cas, le nouveau pays s’est enlisé dans une guerre civile écrasante, bien pire que sa guerre précédente avec Khartoum.

Nous devons aussi nous demander si nous profitons vraiment de ce rejet de la fédéralisation, surtout qu’elle constitue un outil propice pour réunifier ce qui a été divisé, et non pour séparer ce qui est uni. Face à ces développements sanglants qui déchiquètent le tissu social récent dans environ dix pays de la région, il n’est plus approprié de cajoler les sentiments de division imaginaires dans nos cœurs, ni de s’agripper à un seul type de structure constitutionnelle en la considérant sacrée et intouchable. Au contraire, nous devons chercher des solutions adaptées à chaque situation, pouvant être acceptées par les parties en conflit, et offrant aux civils un abri des horreurs qui s’abattent autour d’eux.

Si mon diagnostic s’avère être correct, ceci serait très signifiant pour le Liban, notre patrie. Premièrement, il signifierait que l’élargissement de cette zone d’instabilité a bien rongé le niveau d’attention internationale portée sur nos affaires. Cette diminution entraîne des solutions positives, sachant qu’il y a moins de chance que nous soyons proies à des interventions, et que notre scène étroite sur laquelle se sont concurrencé des pouvoirs régionaux et internationaux autour de nos territoires, aux dépens de notre sécurité et notre stabilité, est presque rendue marginale en comparaison aux grandes scènes arabes plus importantes, qui vivent aujourd’hui des jours difficiles. Néanmoins, ce manque d’attention internationale a aussi des retombées négatives, sachant que la disposition internationale pour aider le Liban est plus faible sur les plans diplomatique, financier, et sécuritaire. Ces retombées impliquent de nouvelles responsabilités pour le Liban : nous devons résoudre nos problèmes nous-mêmes. Contrairement à l’opinion générale, les Libanais sont capable aujourd’hui, bien plus que par dans le passé, et bien plus qu’ils ne le pensent eux-mêmes, de résoudre leurs problématiques eux-mêmes, que ce soit l’élection d’un président ou la réactivation des institutions constitutionnelles paralysées –même la collecte des déchets !

Mais la question principale demeure la suivante : y-a-t-il encore des libanais au Liban ? Nos institutions se sont toutes transformées en une sorte de conseils confessionnels dans lesquels nous nous amusons à prouver nos capacités supérieures à celles des autres en termes de prise de décision, au lieu de réellement prendre ces décisions, toute urgentes ou vitales soient-elles. Une part du contenu de l’accord Taëf, surtout par tous les chemins maladroits empruntés dans son application, a abouti à l’anéantissement du concept de l’état capable qui va au-delà des intérêts de certaines classes. Ce système de classes animait notre vie politique de l’avant-guerre, mais après la fin de la guerre, il fit irruption dans nos administrations publiques, et marqua de ses empreintes graves non seulement nos anciennes institutions administratives, mais aussi les institutions récentes créées post-Taëf.

L’image encore plus répandue est celle de ceux qui abusent des affaires de notre pays, qui sont incapables de se mettre d’accord sur les choses les plus simples, qui nous laissent à distance de nos propres causes, à tel point qu’il n’est plus nécessaire d’intervenir dans nos affaires, parce que nous œuvrons nous-mêmes pour empêcher l’édification d’un état qui transcende les caprices internes de nos confessions, indépendante des désirs d’autres pays. Je vois déjà les sourires s’esquisser sur vos visages quand je vous dis que des dangers guettent notre pays de partout, et que la première mission qui s’impose à nous est la réanimation de notre institution constitutionnelle dans la présidence, le parlement, et le conseil des ministres. Je crains que ces sourires ne se transforment en rires résonnants si j’ajoute que nous pouvons réellement faire cela. Vous pourrez me traiter d’orientaliste naïf quand je vous affirme que le seul véritable obstacle devant la réanimation de ces institutions est notre égoïsme, et la faiblesse de notre protection de notre patrie, non pas quelque complot étranger.

Cependant, certains accordent la priorité au changement des règles du jeu plutôt qu’à mettre fin à la paralysie institutionnelle quasi-totale. Je m’adresse à ceux-là en leur disant : personne ne peut percevoir les défauts de l’accord Taëf, surtout les inconvénients de son application, autant que ceux qui ont modestement contribué à sa conception, et l’ont rédigé sans malice. Ceux-ci précisément, et je me considère en faire partie, ont le droit de souligner les mauvais passages du texte ou de son application, et de prévoir des alternatives plus solides. Mais ils ont aussi le droit de refuser la destruction de ce qui a déjà été érigé, dans la quête de ces alternatives. La logique veut que toutes les institutions constitutionnelles et administratives soient réanimées en condition préalable du développement d’alternatives, et il me semble que la paralysie de ces institutions en tant que moyen de modification de la formulation politique me semble un risque non calculé qui révèle un factionnalisme aigu et une part concrète d’irresponsabilité.

Il n’y a aucun doute qui plane dans mon esprit quant au fait que l’intérêt du pays est relié au souhait de fin de la tragédie syrienne le plus tôt possible, pour un régime politique, légal, et administrative qui satisfait son peuple et met fin à ce désastre. Dès le premier jour, je remarquai que la crise syrienne n’aurait pas de solution militaire, mais exigerait tôt ou tard une solution politique qui pourrait se construire sur les conventions de Genève et les neuf principes de Vienne. Le jour où les canons cessent de retentir en Syrie, nous devrons être prêts à formuler la plus noble des missions que les libanais pourraient rêver : la contribution à la reconstruction du pays qui nous est le plus proche, en tous les sens du terme. On nous a dit maintes fois que le Liban est autant un message qu’une patrie, mais cette patrie est en miette, si bien qu’il est difficile de lui attribuer le fardeau d’un message quelconque. A mon avis, il n’y a pas de mission plus noble pour nous, que ce soit pour promouvoir la stabilité de notre pays, ou de porter ce message qui nous a été attribué en tant qu’équivalant de notre pays, que la quête pour la restitution de la paix civile chez notre voisin le plus proche, et le déploiement d’efforts aux côtés de nos frères pour le reconstruire.

Enfin, comment pourrais-je conclure ce discours sans exprimer cette tristesse ensanglantée qui vit dans nos cœurs, si bien qu’elle fait partie intégrante de nos êtres ? Comment faire cela devant cette violence aveugle qui, sans discrimination, fauche les gens dans leurs maisons, dans les rues de leurs quartiers, dans leurs villes et leurs banlieues, cette violence qui vomit ces flammes sur leurs têtes et les chasse jusque dans les rues, qui les pousse sur les chemins de l’exode et de l’humiliation ? Comment faire cela en un temps où nous exportons vers les rues de Paris un torrent de violence et de contre-violence auxquels nous somme tellement habitués que nous les considérons chose normale ? Ceci n’est pas normal, et notre prise de conscience ne commencera que le jour où nous admettons que rester sans mots, ou simplement professer notre tristesse envers ces événements, appelant les pays étrangers à résoudre ce problème dépassent les règles de base de l’humanité, et révèlent notre manque flagrant de toute responsabilité. Les régimes qui nous tyrannisent émergent des entrailles de nos sociétés, et les mouvements d’obscurantisme qui sèment la mort sur leur chemin vienne du sein de notre culture. Le monde ne pardonnera plus notre paresse mentale, ou nos tentatives de nous soustraire à notre responsabilité quant à ce qu’on fait envers nous-mêmes et les autres. Le monde a raison de nous demander d’assumer la responsabilité des guerres civiles qui nous déchiquètent, des régimes tyranniques qui tentent de nous contrôler, et de cette violence extrême que nous exerçons envers nous-mêmes et lui. Personnellement, je trouve que le monde ne partage plus la vision que nous avons de nous-mêmes, comme si nous étions de simples victimes de ces transformations sanglantes ; il tend même à nous en considérer complices, par nos dires ou par nos faits, surtout par notre inaction, de tout régime ou groupe qui adopte ou exerce cette barbarie. Ne soyons donc pas surpris de la faiblesse de sa condamnation de la violence qui nous touche, ni du fait qu’il nous attribue une part de responsabilité dans ce qui l’affecte. Et vraiment, comment pourrions-nous les blâmer ?

 

Ghassan Salameh

زمن العواصف – غسٌان سلامه

غسٌان سلامه

زمن العواصف 

سنوات خمس مرت، او بالكاد، على بداية حقبة جديدة من تاريخ هذه المنطقة، وهي حقبة من التحولات المختلطة في أسباب حصولها، المعقٌدة في صيرورتها، المتنقٌلة جغرافيا كالعدوى، المأساوية في كثير من إسقاطاتها الإنسانية. كتب عنها الكثير وتعددت في تفسيرها النظريات. ولن أتمكن طبعا، فيما أتيح لي من وقت، من معالجتها بصورة إجمالية بل سأكتفي بإسهام، أقرٌ مسبقا بجزئيته، عن تطورها الراهن، وعن مآلها.

وأول الاسئلة التالي:  هل ان المنطقة العربية ضحية مؤامرة كما قرأت وسمعت، وإن كان الأمر كذلك، فهي مؤامرة من ضد من ولأي هدف؟ يقيني ان ما هو حاصل لا يمكن البتة اختزاله في نظرية تآمريه، ولكنه لا ينفيها بالكامل. فالمنطقة تشهد تفجٌرا ذاتيا لعوامل اجتماعية وسياسية واقتصادية وايديولوجية تعتمل فيها منذ سنوات طويلة، وهي ليست بالضرورة حكرا عليها. لكن موقع المنطقة المميز في السياسة الدولية كان من شأنه ان يدفع عددا من اللاعبين الاقليميين والدوليين للسعي للاستفادة منها، إن للدفاع عن مصالحهم او لتمرير مشاريعهم. ومن الضروري بالتالي عدم الوقوع في علاقة سببية مقلوبة رأسا على عقب من خلال النظر الى محاولات اللاعبين الاساسيين التأقلم مع تحولات المنطقة أو حماية أنفسهم من تداعياتها، أو الاستفادة منها ما استطاعوا، وكأنهم هم من أنتجها بالأساس.

وفي أسباب اندلاع الاحداث الجارية في عالمنا العربي اولا وصول النظم التسلطية فيه الى نوع من الضعف بل من الإنهاك. فمنطقتنا بقيت عصيٌة على ما يسمى ب »الموجة الديمقراطية الثالثة » التي انطلقت من جنوب اوروبا في منتصف السبعينيات، وانتقلت منها الى اميركا اللاتينية، ومنها الى اوروبا الوسطى والشرقية والى عدد من الدول المتفرقة في القارات الاخرى. وأدت هذه الموجة الى وضع غير مسبوق في التاريخ العالمي، وهو ان أكثرية دول العالم انتقلت من انواع متنوعة من الإستبداد الى مزيج من التعددية السياسية ونظام السوق الاقتصادي، مدفوعة بمحركٌات عديدة، منها حركة العولمة المالية، وانتهاء الحرب الباردة والاستقطاب الثنائي الذي صاحبها، وثورة تكنولوجيا الاتصال الهائلة. وكانت النتيجة، مع انتهاء القرن المنصرم، ان نحوا من ١٢٠ دولة من أصل ١٩٣ باتت تعتبر، الى هذا الحد او ذاك، دولا ديمقراطية. غير ان المنطقة العربية بقيت يومها خارج هذا التحوٌل لدرجة ان عديدين كتبوا المؤلفات عمٌا أسموه بـ « الإستثناء العربي » لتفسير بقاء مجتمعاتنا خارج الحركية الديمقراطية العالمية. ويمكن بالتالي اعتبار ما سمي ـبـ « الربيع العربي »، وكأنما للإيحاء بتأخر موسمه، نوعا من الإرتداد المتأخر لتلك الموجة، يؤدي الى التحاق منطقتنا المتعثر بركب حركية الخروج من التسلٌط. ومن سخريات القدر ان تلتحق حركة الاحتجاج العربي بالموجة العالمية في الوقت الذي تشهد فيه تلك الموجة نوعا من التباطؤ، بل من الانحسار، مع عودة اشكال متنوعة من الإستبداد والتسلط الى دول كانت تبدو وكأنها تسير قدما في طريق التعددية السياسية. كما ان من العلامات الفارقة، لاسيما في مصر واليمن وليبيا، ان الاحتجاج على التسلط، وكان خافتا لعقود من الزمن، لم يتفجٌر فعلا الا يوم تيقن الجميع ان الحاكم هو فعلا بوارد توريث الدولة لأحد أبنائه وكأنها ملكه الخاص. يومها انفضٌت عن الحاكم شريحة واسعة من النخبة التي كانت تؤيده، لاسيما في الجيش، وتركته يواجه المتظاهرين بنفسه ومع افراد حاشيته الأقربين بل أنها جزءا منها التحق بموجة الإحتجاج.

ومن اسبابها، ثانيا، رهان عدد من الانظمة العربية التي سعت للاستفادة من الانفتاح الاقتصادي على سيرورة العولمة لتعزيز التجارة واستقطاب الاستثمارات والسياحة، دون التنبه الى ان الانخراط في السوق العالمية لا يمكن له ان يبقى دون اسقاطات على اوضاعها السياسية، كمثل فقدان تدريجي لقدرتها على التحكم باقتصادها الوطني، او ضرورة احترام القواعد المعروفة في عمليات الخصخصة، او التأفف الشعبي الطبيعي من سياسات رفع الدعم عن المواد الاستهلاكية، او مخاطر استئثار اصحاب السلطة بمقدرات الاقتصاد، او أثار القبول بقواعد صندوق النقد ومنظمة التجارة وغيرها من المؤسسات المانحة للقروض على السيادة الوطنية. بهذا المعنى فإن الحراك الراهن انتفاض ضد سوء توزيع الثروة المستجدٌة بقدر ما هو احتجاج على التفرد بالحكم. من هنا ما سمعنا في غير تظاهرة من مناداة الناس للحكام قائلين: « او إمارة او تجارة »، بمعنى رفض تحويل مواقع الحكم الى وسيلة لإثراء الحكام وأقاربهم ومواليهم.

السبب الثالث هو هذه الثورة التكنولوجية التي اندلعت منذ نحو عقود ثلاثة، وما زلنا نعيش في خضمٌها، وهي تنتج من المفاعيل السياسية والاجتماعية في أقل من جيل واحد ما هو أعمق وأوسع مما كانت الثورة الصناعية قد أحدثته في أكثر من قرن.  وتجعل هذه الثورة المتسارعة في وسائل الاتصال التعبئة الشعبية أكثر يسرا وانتقال المعلومة أسرع وأبخس ثمنا بمعنى ان تظاهرة حاشدة قد تبدأ بتغريده واحدة على تويتر، وان فضيحة كبرى قد تنتشر كالنار في الهشيم بجملة او اثنتين على فايسبوك. وبات ابداء الرأي متاحا للعموم لا للنخبة وحسب، فتزايدت الفتاوى والآراء والدعوات دون رقيب، وغالبا دون تفكٌر أصحابها بمفاعيل مواقفهم. كما انتجت تلك الثورة حالات من التواصل والتفاعل والتضامن العابر للحدود بين افراد وجماعات يدينون بالدين او بالمذهب او بالتيار الفكري نفسه على حساب احتكار الدول السابق لمجالات الفكر والثقافة تتحكم بمضمونها كيفما شاءت. وانتقلت عدوى تحدي الأوضاع القائمة مع تحول التواصل للتماثل بمعنى استعارة الشعار والنشيد والآليات من بلد لآخر. وفتحت الثورة التكنولوجية المجال رحبا امام حركات الإسلام السياسي بالذات وكانت قواه قبلها مكبوتة ومحاصرة فتفجرت من عقالها وتمكنت من الاستيلاء السريع على القسم الأكبر من السوق الفكرية والسياسية العربية.

وللبيئة ايضا دور لا يستهان به في اندلاع ما سمي بـ « الربيع العربي »، لاسيما في انكسار حاد للتوازن السابق بين النمو الديمغرافي والموارد المتاحة. ونرى امثلة فاقعة على ذلك في مصر حيث ادى التكاثر السكاني الى ازمات معيشية واسكانية خانقة، وفي سوريا حيث وصل النمو الديمغرافي الى أعلى مستوياته العالمية خلال العقود الأربعة الماضية وحيث اندلعت النزاعات المحلية بسبب نقص المياه في منطقة الجزيرة وأدت الى تهجير طال أكثر من ٣ ملايين سوري في السنوات التي سبقت الازمة. ووصلت العوامل البيئية الى حدها الاقصى في بلد مثل اليمن حيث يصل التناقض بين الانفجار السكاني والموارد الطبيعية، لاسيما المائية، المتاحة الى حده الأقصى. ومن المنطقي القول ان هذه المعطيات الأساسية لن تتغير في حال التوصل لحل سياسي ثابت في أي من هذه البلدان.

وكان للنفط دور مهم ايضا إذ ان ارتفاع اسعار النفط والغاز خلال العقد الأول من القرن الواحد والعشرين ادى الى فوائض هائلة ضاعفت من قدرة الدول النفطية على التأثير في مجريات الامور داخل الدول الأخرى بينما افقد الدول العربية المستوردة الكثير من امكانياتها المالية، مما جعل التناقض صارخا بين الامكانيات المتاحة للدول النفطية وبين جاراتها، فاتحة امام الأولى جادات واسعة للتأثير في مضامين السياسة وفي قرارات الجامعة العربية. وقد يلعب انهيار اسعار النفط الذي نشهده الآن ، والذي لا يبدو انه على وشك ان يتوقف قريبا، دورا جديدا معاكسا في إضعاف الدول النفطية من خلال حرمانها من الاداة الاساسية لنفوذها الداخلي والاقليمي بحيث يمكن ان نتصور ان تمتد شرارة الاحتجاج اليها.

انها اذن تحولات تضرب عميقا في نسيج المجتمعات العربية بحيث يصعب اختزالها في قراءة محض سياسية او تآمريه. والحق يقال ان هناك نوعا من العلاقة الجدلية قد نشأت بسرعة بين الاضطرابات الداخلية والتدخلات الخارجية فراحت الاضطرابات تستدعي التدخلات، وباتت التدخلات تغذي الاضطرابات. ويصعب بالتالي التصور بأن قرارا اتخذ في مكان ما من العالم لتفجير المنطقة. ويصعب علينا أخيرا، وهذا أكثر اهمية، التصور بأن الحلول السياسية للأزمات الراهنة، ستكون كافية لمعالجة مسبباتها العميقة، ولو ان السعي للتوصل لهذه الحلول ضروري دوما لتخفيض نسبة العنف وللعودة بالمجتمعات الى حال من السلم الاهلي، ناهيك عن ان حالة الاحتراب تفاقم بدورها من حدة تلك المسببات ان بسبب كلفة الحروب الباهظة او بسبب تغليب المساعدات الانسانية الطارئة على الحاجات التمويلية ذات الطابع التنموي. لذلك يغلب الشعور بهشاشة الأوضاع القائمة، لا في الدول التي ما زالت تعيش في خضم هذه الاضطرابات مثل ليبيا وسوريا واليمن وحسب، بل أيضا في تلك التي تبدو وكأنها استعادت بعضا من الاستقرار مثل تونس ومصر، بل في دول أخرى تمكنت حتى الساعة بالنأي بنفسها عن هذه الاضطرابات.

تضافرت هذه العوامل لإحداث تحركات شعبية حقيقية. لكن وضع المنطقة الحساس كان لا بد ان يدفع مختلف القوى الخارجية للتأثير في مجرياتها. وان كان لا بد من تلخيص ما يجري على هذا الصعيد لقلت انه نوع من أقلمة للأمن يرافق عولمة للاقتصاد. فاقتصاديات المنطقة باتت جزءا من السوق العالمية ولكن امنها بات اكثر تأثرا بدول الجوار.

ذلك ان ما يميز الحقبة الحالية برأيي هو ضعف نسبي لتأثير الدول الكبرى مقابل تنام ملموس في تأثير الدول الاقليمية. أسمع انتقادات واسعة لتخبط أوباما في القضايا التي تعنينا ولكني أرى على العكس ان منهجه واضح وهو انه يريد للولايات المتحدة ان تتجنب التدخل، لاسيما العسكري منه، وقدر الإمكان، في شؤون هذه المنطقة. وهو يرى أن بلاده لم تعد تحتاج نفط المنطقة وان روسيا، عدو الأمس، عاجزة عن التحكم بمصيرها، وان إسرائيل ابتزت اميركا بصورة كافية، وان على حلفاء اميركا التقليديين ان يتدبروا أمورهم بأنفسهم دون توريط بلاده كما في السابق. وهو يرى أيضا، وهذا أهم، ان بلاده خاضت حروبا مكلفة وبالنهاية عقيمة، ان لم تكن ذات مردود سلبي، أيام سلفه، لاسيما في العراق وأفغانستان، بينما سيذكر التاريخ انه ما تدخل في ليبيا الا والأوروبيون امامه ولفترة محدودة، ولم يتدخل مباشرة في سوريا والعراق الا بعد استفحال امر داعش، بينما تمكن من تجنب حرب جديدة مع إيران من خلال التفاهم على برنامجها النووي. وهو يرى أخيرا ان المصلحة القومية لبلاده مهددة في آسيا أكثر مما هي في منطقتنا ومن هنا مقولته بالتوجه نحو الشرق الأقصى. كل هذه الاعتبارات معلنة ومكررة وينبغي اعتبارها نوعا من العقيدة على الرغم من رفض خصوم أوباما في الولايات المتحدة لها، ومن عجز أعداء اميركا عن تصديقها ومن تأفف حلفاء واشنطن في منطقتنا منها. ويبقى السؤال قائما: هل ان اميركا، بعد مغادرة أوباما للبيت الأبيض، ستقوم بإقفال هذا الفاصل الإنكفائي او انها ستستمر به؟ وحدسي ان الانكفاء عن حروب العالم الساخنة ما زال بالعموم يلقى دعما في الرأي العام الأميركي على الرغم من الخدوش العميقة التي الحقها به توسع الظاهرة الداعشية والتدخل العسكري الروسي المباشر في سوريا حيث ازدادت الضغوط على أوباما لمزيد من التدخل المباشر في سوريا والعراق على الرغم من تمنعه الجازم عن ذلك طيلة السنوات الخمس المنصرمة.

ويترافق انعدام الرغبة عند الأميركان مع تقلص القدرة عند غيرهم من دول الغرب. فالنظام الدولي الذي انشأه الغرب تدريجيا طوال نحو خمسة قرون يتآكل اليوم امام ناظرينا دون ان يحل مكانه توافق حقيقي بين الدول الصاعدة على ماهية نظام عالمي بديل. نحن في نوع من الغسق تتراجع فيه انوار الغرب، بالمؤسسات والقيم والقواعد التي نشرها في العالم، دون ان ينبلج صباح آخر. فالصين منهمكة في تدعيم موقعها في جوارها، وروسيا تتصرف اساسا كقوة اقليمية في اوكرانيا والقفقاس وفي منطقتنا ايضا باعتبارها مجاورة لروسيا ولها فيها مصالح وتلمس فيها مخاطر على امنها الوطني، بينما تسعى دول كالهند والبرازيل ونيجيريا واندونيسيا وإيران، وبصعوبة بالغة، وبعدد من الإخفاقات، الى بناء المقومات الذاتية الضرورية لتكوين أقطاب جديدة. من هنا هذا الشعور بأفول المعادلة الدولية التي كان الغرب مهندسها الأول دون ان تتضح معالم معادلة جديدة.

ومن الطبيعي التوقف بالذات عند روسيا لاسيما بعد انخراطها المباشر في الحرب السورية. هناك طبعا روسيا الساعية لاستعادة بعض ما فقدته في ربع قرن بسبب التراجع الحاد في قدراتها لكن قادتها من الواقعية بقدر كاف لعدم تصور العودة الى نظام دولي ثنائي القطب كما كان الأمر عليه قبل 1989. ويمكن القول ان الصين تحاول تعزيز هيمنتها على جوارها المباشر كخطوة تمهيدية ضرورية على طريق التحول الى قوة عالمية، بينما تسعى روسيا لتعزيز موقعها في محيطها المباشر كتعويض عن موقع دولي سابق لا تتوهم ان لها القدرة على استعادته. وينظر الينا من موسكو بوصفنا جزءا من هذا الجوار بمعنى ان منطقتنا مصدر مخاطر كما هي مساحة فرص امام روسيا، مثلها مثل دول أوروبية عريقة، وعلى خلاف الولايات المتحدة او الصين وكلاهما ليستا على تماس مع منطقتنا. من هنا سعي موسكو الحثيث لتدعيم موقعها في سوريا والانفتاح على مختلف دول المنطقة مثل مصر والعراق او حتى دول الخليج. ومن سخريات القدر ان موسكو، على عكس ما كانت عليه الأمور خلال الحرب الباردة، باتت تعتبر نفسها حامية للأنظمة القائمة بينما تتهم الولايات المتحدة بلعب دور مباشر في تشجيع التحركات الإحتجاجية وفي زعزعة الأنظمة وهو كلام بات يلقى صدى في معظم عواصم المنطقة. ومن سخرياته أيضا ان موسكو باتت تصور دورها كحام للأقليات في منطقتنا بينما هي تأخذ على فرنسا وعلى غيرها من دول الغرب تخليها عن هذا الدور وتغليب مصالحها التجارية على أي اعتبار آخر مما يدفعها الى مسايرة للعنصر المسلم السني في مختلف دوله.

وتشكل المنظمات الدولية جزءا مهما من إرث المرحلة السابقة من السياسة العالمية. كان يمكن ان نتصور الامم المتحدة وهي تواكب بنجاح هذا العبور الواسع من نظام دولي الى آخر ولكن أحلام سنوات ما بعد الحرب الباردة قد اندثرت الى حد بعيد والأمم المتحدة عاجزة اليوم عن لعب دور الحاضنة لاستبدال نظام عالمي بآخر. لديها اولا صعوبة عضوية في التعامل مع النزاعات الاهلية المندلعة هنا وهناك وهي التي نشأت لمعالجة الحروب بين الدول لا في دواخلها. ولديها ايضا صعوبة في ايجاد التمويل الكافي لعمليات السلام كما للوكالات الاغاثية الملحقة بها او المنبثقة عنها. وطرأت امور حديثة عليها فاقمت من عجزها كعودة التوتر للعلاقة الروسية مع الغرب الذي كان له التأثير الواسع على عمل مجلس الامن الدولي فارتبك تنفيذ قراراته عن ليبيا وسط تفاسير مختلفة لتلك القرارات، وظهر عجزه الفاقع في الحالة السورية، ناهيك طبعا عن قيادة اممية لا تحظى بكثير من الهيبة والاعتبار لدرجة ان مؤتمر فيينا عن سوريا كاد ان ينعقد بغياب أي ممثل للمنظمة الأممية حتى اللحظة الأخيرة.

أدى كل هذا الى نوع من الوضع المتناقض يترافق فيه اندماج المنطقة في آليات العولمة المالية والاقتصادية مع تعاظم دور الدول الإقليمية الأمني والسياسي. كانت إيران سبٌاقة في هذا السياق. الواقع ان هناك أكثر من إيران واحدة. هناك دولة قومية وارثة لإمبراطورية مالت تقليديا، وما تزال، للتوسع في محيطها، وهناك إيران الدولة الشيعية المذهب الساعية للاستفادة من وشائج المذهب لتعبئة الأنصار على طول الخريطة الشيعية، وهناك إيران الثورة الاسلامية التي تسعى للتحكم بمسار الاسلام السياسي على اختلاف مذاهبه، وهناك إيران الطامحة بدور عالمي يسهم بصياغة مرحلة ما بعد تفوق الغرب. في مطلع الحقبة الراهنة، توهمت إيران، وعلى اعلى مستوياتها، ان ما هو جار يسير لمصلحتها من كل الجوانب بل بادر مرشدها الى نعت الحقبة الراهنة ب »الربيع الإسلامي » تأييدا له بل وتحريضا عليه. لكن انتقال العدوى من تونس ومصر وليبيا الى العراق وسوريا واليمن جعلها تشعر بالارتباك فانزلقت الى قراءة اضيق تغلب فيها الاعتبارات المذهبية على حماسة عابرة لـ « ربيع » باتت ترى مخاطره عليها أعظم من وعوده.

اما تركيا فقادتها دخلوا باكرا في وهم مشابه كلٌفنا وبات يكلٌفهم ايضا الكثير. التقت نظريات داوود اوغلو الاستراتيجية مع طموحات اردوغان الشخصية ومع جهود الاقتصاد التركي التصديرية لإنتاج نيو عثمانية نشطة دخلت المنطقة أولا من بابها الاقتصادي قبل ان تسعى لإعادة انتاج النسق السياسي والايديولوجي العربي بمضمون مذهبي وحزبي واضح، لاسيما من خلال التعاون مع حركة الإخوان المسلمين. لكن رياح المنطقة سارت بما لا تشتهي سفن تركيا فعزل الإخوان عن حكم مصر وتعثر مشروع اسقاط النظام السوري كما العراقي وتفجرت ليبيا بل تغلغلت الفئوية مجددا للداخل التركي الأكثر تعقيدا مما يعتقد اثنيا ومذهبيا. كان بالتالي على انقرة ان تحذو حذو طهران فتعيد صياغة مشروعها لتغلب المذهبي فيه على السياسي وهي ما تورعت عن ذلك فعلا وهي مستمرة به بعد الجزلة الإنتخابية الأخيرة.

اما إسرائيل فكانت تغرٌد كعادتها خارج السرب. من الطبيعي ان تشعر النخبة الإسرائيلية بالارتياح من تقوض قوة عدد من الدول العربية كما من تقارب عدد آخر منها مع تل أبيب، ناهيك عن الهبوط الدراماتيكي في الاهتمام العربي بالقضية الفلسطينية بين عموم العرب. لكن القول بأن إسرائيل هي المستفيد الوحيد من هذه التحولات ينطلق من وهم شائع ان الدول العربية كانت، قبل ان تندلع هذه الأحداث، تقف وقفة رجل واحد لتحرير فلسطين. لا يعني ذلك ان إسرائيل لن تسعد بإنهاك الدول المحيطة بها، وقد صدر فعلا عن رئيس حكومتها كلام خطير فيما يخص مستقبل الجولان خلال زيارته لأخيرة لواشنطن. لكن الخطر المتأتي عليها لم يكن من تلك الدول بل ان إنهاك الدول، لاسيما تلك التي وقعت اتفاقات سلام معها، ليس بالضرورة من مصلحتها. ثم ان محاولتها بناء جسور مع دول الخليج لوقف توقيع الاتفاق النووي الايراني باءت بالفشل. لذلك، وبقدر ما يمكن للمرء ان يفهم تطور الأفكار داخل نخبة القرار الإسرائيلية، فالشعور الغالب هو ان التحولات الجارية في المنطقة، ناهيك عن تفجيرات باريس الأخيرة، تنتج هناك مشاعر مختلطة، متناقضة، بل انها تضاعف من بارانويا الخطر الوجودي بدلا من ان تهدئها.

اما الدول العربية التي لم تصب، او لم تصب بعد، بعدوى الاحتجاجات فقد اعتبر عدد منها ان من مصلحته التدخل المباشر او غير المباشر تمويلا او تسليحا او توظيفا لقدراتها الدبلوماسية والإعلامية، في شؤون الدول المضطربة. وقد شهدنا بالذات انخراطا ملموسا لدول الخليج في عدد من الساحات الملتهبة. لكن هذا التدخل بعيد عن ان يكون حاسما بل انه في الواقع مني بالإجمال بالفشل هو أيضا. وأسباب الفشل عديدة أولها ان المال لا يكفي لتغيير مسار الأمور بل الحاجة أيضا لكادر دبلوماسي وسياسي يوظف هذا المال بطريقة إيجابية. وثانيها ان إيجاد المال بات هو الآخر صعبا بسبب انخفاض أسعار النفط من جهة وتعدد الساحات الملتهبة من جهة أخرى. وثالثها ان العلاقات بين دول الخليج نفسها تميزت بالتنافس، بل والاختلاف او حتى التصادم، أكثر منه بالتفاهم والتضامن، مما جعل سياسة دولة خليجية ما تتعطل بسبب معارضة الأخرى لها كما هي الحال في مصر او في ليبيا مثلا.

واختلفت دول الخليج تحديدا وبصورة حادة حول الاسلام السياسي. والواقع ان الدين يلعب في المجال العام أدوارا مختلفة. فالدين اولا عقيدة تؤمن بماورائيات فاعلة وتعتمل فيها نقاشات دائمة حول التفسيرات والاجتهادات، فتنشأ من اختلاف الاجتهادات مدارس متنافسة تستمر عبر القرون وغالبا ما تتباعد عوض ان تتقارب. والدين أيضا مؤسسات تعمل للحفاظ على تلك العقيدة وبالساس للحفاظ على نفسها وعلى مصالح القيمين عليها. والدين ثالثا لغة تعبوية يلجأ اليها البعض حين تتعطل مفردات السياسة، فتسهل له مهام مضاعفة الأنصار وجمع القدرات المالية. والدين أيضا سوق تنافسية بين الأديان والمذاهب والتيارات من أزقة بغداد حتى هضاب افريقيا. لقد ظهرت وظائف الدين هذه جميعا وبقوة خلال هذه الفترة من الزمن وتنوعت مسالك الدول منها بين من حاول توظيف تيار منها لمصلحته، وبين من تبنى تيارا منافسا، وبين من وضع إعادة الإسلام السياسي الى قمقمه في صدر أهدافه. بالمقابل فقد حاولت الحركات الإسلامية نفسها ان تحتفظ باستراتيجياتها المستقلة عن الدول التي تدعمها كما حاولت توريط تلك الدول ما استطاعت في مشروعها للوصول للسلطة حيث بدا لها الأمر متيسرا. وباتت داعش تشكل النموذج الأكبر والأكثر فظاعة لهذا التداخل بين سبل توظيف الدين في النزاعات مع مشاريع سياسية بحتة لمجموعات مقاتلة ومع سياسات دول تبحث عن أدوات للوصول الى مآربها. وحدسي ان الطفرة الدينية التي بدأت منذ نحو نصف قرن، لاسيما غداة هزيمة 1967، باتت تشهد قدرا من التباطؤ. بالمقابل، قد لا تكون الحمٌى المذهبية، وهي سيرورة تختلف نوعيا عن الظاهرة الدينية، والتي تفاقمت بعد غزو العراق سنة 2003، قد وصلت الى ذروتها بعد.

ان صح هذا التشخيص السريع للحقبة المضطربة جدا التي نمر بها فنتيجته الأولى هي أننا لسنا بعد بصدد اقفال تلك الحقبة او اعلان انتهائها. قد يتطلب الأمر زمنا يقاس بالسنوات، وبالتأكيد لا بالأسابيع ولا بالأشهر، قبل ان تستقر المنطقة على حال جديدة. ثم ان العوامل البنيوية المتفجرة الآن تعني أيضا ان رقعة عدم الاستقرار قابلة للتوسع على الأقل بقدر ما هي قابلة للانحسار. وفي الجوهر فهي تعني أخيرا ان الحلول السياسية والدبلوماسية، على الرغم من طابعها الملحٌ، تبقى دون خطورة التحديات الوجودية التي تواجه أبناء

المنطقة.

وحين نواجه التحديات الوجودية فإننا ننزلق بصورة لاشعورية لسؤال مكمٌل وهو وجود من؟ من نحن لنسأل حقيقة عن أمر بقائنا من عدمه؟ وننزلق مجددا للتساؤل عن مصائر الدول التي رسمت حدودها لنا منذ نحو قرن من الزمن وهي تبدو اليوم مهددة بالمقصات العاملة في خريطة المنطقة خزقا هنا ولزقا هناك. الم نخبر بدفن اتفاق سايكس بيكو؟ ألا نرى نمو كيان بل كيانات كردية هنا وهناك؟ الا نلمس مآل التطهير العرقي والديني والمذهبي الجاري امام أعيننا؟ أسمع همسا بعودة الضم هنا والتقسيم هناك بينما يستعيذ القاصي والداني بالله من شروره الفظيعة. وأرى من جانبي ان الدول الحديثة صنيعة بشرية، مهما تبارى البعض في تقديسها، وهي، ككل صنائع البشر، عرضة للتوسع وللتقسيم وللضم وللاندماج في غيرها بل وللفشل الذي قد يؤدي الى موتها. لذلك علينا أن نخرج من اللاهوتية المتزمتة ونعتبر مما نرى فنسأل أنفسنا ماذا انتفعت الباكستان فعلا من انفصالها عن الهند، وشمال قبرص عن جنوبها، او جنوب السودان عن شماله مثلا وقد دخلت الدولة الوليدة هناك في حرب أهلية طاحنة أسوأ بكل المعايير من حربها السابقة مع الخرطوم. وعلينا بالمقابل أيضا ان نسأل ماذا ننتفع فعلا من نبذ الفدرالية بالمطلق خصوصا عندما تكون الفديرالية أداة لتوحيد ما تمزق لا لتفريق ما هو موحد. فأمام هذه التطورات الدامية التي مزقت النسيج الوطني الحديث في نحو عشر دول من دول المنطقة، لم يعد مفيدا ان نداعب فوائد التقسيم الوهمية في دواخلنا ولا ان نتمسك بشكل واحد من اشكال البنى الدستورية باعتباره مقدسا ولا يمسٌ. علينا على العكس ان نستنبط في كل من هذه الحالات حلولا خاصة بكل واحدة منها، يمكن ان تقبل به القوى المتقاتلة وان توفر على المدنيين ٌقدرا من الأهوال التي نزلت بهم.

وان كان هذا التشخيص صائبا فإنه يعني الكثير لوطننا لبنان. فهو يعني اولا ان اتساع رقعة اللااستقرار قد أنقصت كثيرا من مستوى الاهتمام الخارجي بشؤوننا. ولهذا التناقص نتائج ايجابية واضحة بمعنى اننا أقل عرضة للتدخلات وان ساحتنا الصغيرة، حيث تنافست القوى الإقليمية والدولية وتصارعت على ارضنا وعلى حساب امننا واستقرارنا، تكاد ان تكون قد امست هامشية بالمقارنة مع الساحات العربية الكبيرة والأعظم شأنا التي تشهد الآن اياما صعبة. ولكن لتناقص الاهتمام الخارجي اثارا سلبية أيضا بمعنى ان الاستعداد الخارجي لدعم لبنان بات أضعف دبلوماسيا وماليا وامنيا. وترتب هذه الآثار مسؤوليات جديدة علينا لتقليع شوكنا بأيدينا. فعلى عكس ما يعتقد كثيرون، فانه بمقدور اللبنانيين اليوم، اكثر بكثير من حقب عديدة سابقة، واكثر مما يعتقدون اجمالا، ان يعالجوا قضاياهم بأنفسهم من انتخاب رئيس جديد الى إعادة تشغيل المؤسسات الدستورية المعطلة … حتى جمع النفايات.

ولكن السؤال الأساس هو: هل ما زال هناك من لبنانيين في لبنان؟ لقد تحولت مؤسساتنا جميعها الى نوع من المجالس الملية نتسلى فيها بإثبات قدرتنا على منع الآخرين من اتخاذ القرارات أكثر من العمل على اتخاذها حتى لو كانت ملحة او حتى حيوية. لقد أدى بعض مضمون اتفاق الطائف، وخصوصا جل الطرق الخرقاء التي اتبعت في تطبيقه، الى اندثار مفهوم الدولة القادرة المتجاوزة للمصالح الفئوية. كانت تلك الفئوية تحرك حياتنا السياسية قبل الحرب ولكنها اقتحمت بعد الحرب ادارتنا العامة أيضا فطبعت بآثارها الوخيمة لا مؤسساتنا الإدارية القديمة وحسب بل تلك المؤسسات الجديدة التي استحدثناها بعد الطائف.

والصورة الأكثر انتشارا عنا هي صورة العابثين بشؤون بلدنا، العاجزين عن التفاهم على أبسط المسائل، الناءين بأنفسنا عن قضايانا بحيث لم يعد هناك من حاجة للتدخل في شؤوننا لأننا نعمل بأنفسنا على منع قيام دولة مترفعة عن أهواء طوائفنا في الداخل ومستقلة عن رغبات دول الغير. وإني أرى مسبقا الابتسامة على وجوهكم إن قلت لكم أن الأخطار تحدق بوطننا من كل صوب وأن اولى المهام التي تواجهنا هي إعادة إحياء مؤسساتنا الدستورية من رئاسة وبرلمان وحكومة. وأخشى ان تتحول الابتسامة الى ضحكة مجلجلة ان أضفت أن بوسعنا فعلا ان نقدم على ذلك. وقد يذهب بكم الأمر ان اعتباري مستشرقا ساذجا حين أضيف ان المانع الحقيقي امام عودة الحياة لتلك المؤسسات هو في أنانيتنا وفي ضعف حرصنا على وطننا، ومنه قبولنا الوصول الى ذكرى جديدة للإستقلال بلا رأس للدولة، لا في أي مؤامرة خارجية.

الا ان هناك من يرى الأولوية في تغيير قوانين اللعبة قبل وقف التعطيل المؤسسي شبه الشامل. لهؤلاء أقول: لا ير عيوب اتفاق الطائف، وخصوصا مثالب تطبيقه، قدر أولئك الذين أسهموا بتواضع بالتوصل اليه وايدوه دون أي رياء. يحق لهؤلاء تحديدا، واعتبر نفسي واحدا منهم، ان يشيروا الى مواضع الخطأ في النص كما في التطبيق وان يفكروا ببدائل أكثر متانة. لكنه يحق لهم أيضا ان يرفضوا هدم ما هو قائم سعيا وراء تلك البدائل. فالعقلانية تقضي بإعادة الحياة لكل المؤسسات الدستورية والإدارية كشرط مسبق لتطويرها بينما يبدو لي ان تعطيل هذه المؤسسات كوسيلة لتعديل الصيغة السياسية هو نوع من المجازفة غير المحسوبة تشي بفئوية حادة وبقدر ملموس من انعدام المسؤولية.

ولا شك عندي ان مصلحة بلدنا تقضي أيضا بتمني انتهاء المأساة السورية، وبأسرع وقت ممكن، على منظومة سياسية وقانونية وإدارية ترضي أهلها وتضع حدا للرزية الواقعة عليهم. ذلك اني رأيت، ومنذ اليوم الأول ولم أغير رأيي منذ ذلك اليوم، ان الأزمة السورية لا يمكن ان تحل عسكريا بل هي تستدعي عاجلا ام آجلا حلا سياسيا قد يبنى على بيان جنيف وعلى مبادئ فيينا التسعة. ويوم تصمت المدافع في سوريا، علينا ان نكون جاهزين لصياغة أرقى المهام التي يمكن ان يطمح اليها اللبنانيون الا وهي الإسهام بإعادة بناء البلد الأقرب لنا بكل معاني القرب. قيل مرارا ان لبنان رسالة بقدر ما هو وطن ولكن الوطن ممزق لدرجة يصعب معها تحميله عبء أي رسالة. ولا أرى مهمة أسمى لنا، إن لتعزيز استقرار وطننا أو لحملنا تلك الرسالة التي قيل انها صنو وطننا، قدر السعي لعودة السلم الأهلي لجارتنا الأقرب والعمل الى جانب أشقائنا فيها على إعادة بنيانها.

أما بعد، فكيف لي ان اختم هذه الكلمة دون البوح بالحزن المدمي الذي بات يسكن في دواخلنا حتى صار جزءا منا؟ كيف لا ونحن نرى العنف العشوائي يحصد الناس دون تمييز في منازلهم وفي شوارع أحيائهم، في مدنهم وضواحيهم، تنزل حممه عليه من الجو وتقذف بهم في الشارع، بينما تشرد آخرون على دروب النزوح والمذلة؟ كيف لا وقد بتنا نصدٌر الى شوارع باريس سيلا من العنف والعنف المضاد الذي اعتدنا عليه لدرجة اعتباره اعتياديا؟ لكنه ليس كذلك، وصحوتنا تبدأ يوم نقر بأن سكوتنا عنه او الإكتفاء بالتأسف لحصوله واستدعاء الخارج لمعالجته، فيه تجاوز لأبسط القواعد الإنسانية وانعدام صارخ لمسؤوليتنا. ان الأنظمة التي تستبد بنا خارجة من رحم مجتمعاتنا، والحركات الظلامية التي تنشر الموت في طريقها منبثقة من صلب ثقافتنا، والعالم ما عاد يتسامح مع تكاسلنا الذهني ولا مع تملصنا من مسؤولية ما نفعله بأنفسنا وبالآخرين. بل هو حق العالم علينا ان نتحمل مسؤولية حروب اهلية تمزقنا وانظمة مستبدة تتحكم برقابنا وعنف أقصى نمارسه على أنفسنا وعليه. وشعوري ان العالم ما عاد يشاركنا نظرتنا الى ذواتنا وكأننا في عداد ضحايا هذه التحولات الدامية بل بات يميل لإعتبارنا متواطئين، بالفعل او بالقول وخصوصا باللافعل، مع كل نظام وكل جماعة تقوم بتبني البربرية او تمارسها. فلا نتعجبن من خفوت تنديده بالعنف الذي يصيبنا ولا من تحميله لنا بعض مسؤولية عما يصيبه. وكيف لنا بالفعل ان نلومه ؟

  • محاضرة القيت بدعوة من  » جمعية اعضاء جوقة الشرف في لبنان « 

بيروت في 19 تشرين الثاني 2015

Femme de tête comme de coeur, Leïla Shahid, à l’image de la Palestine

  • Écrit par Eric Anglade
  • Retrouvez l’article sur Al Maouja

Leïla Shahid vient de quitter ses fonctions d’ambassadrice de la Palestine auprès de l’Union européenne. Après ces nombreuses années passées à plaider et défendre la cause de son peuple, elle entame un nouveau cycle dans sa vie et consacre son premier voyage au Maroc, pays avec lequel elle a des liens profonds. De passage sur Ouarzazate en partance pour les trésors culturels de la région Sud Est du Maroc, elle a accepté de prendre le temps du dialogue avec l’équipe d’almaouja.com pour nous dessiner son parcours de vie et nous faire partager ses vues sur les bouleversements actuels qui traversent notre monde. Fidèle à elle-même, Leïla Shahid nous délivre un message de responsabilité où la reconnaissance de la gravité de l’état du monde n’empêche pas d’assumer l’espoir du mieux, et d’encore travailler à son avènement.

Almaouja.com – Pourriez-vous nous décrire les grandes étapes de votre vie ?

Leïla Shahid – La vie est faite comme les saisons de la nature, par des cycles. Je suis née un année après la Nakba, en 1949 donc, au Liban et en exil, de parents originaires de la Palestine mais partis tous deux assez tôt ; mon père pour faire ses études, notamment de médecine, et ma mère, née à Jérusalem, venant d’une famille militante qui s’est confrontée dès 1936 aux britanniques alors en charge de la Palestine, et qui s’est trouvée déplacée à Beyrouth.

Le premier cycle de ma vie aura été la découverte que j’appartenais à un peuple qui existait sans patrie. Ce fut pour moi la découverte de l’injustice envers la Palestine accompagnée des sanglots de ma mère, femme très positive et à qui je ressemble mais qui a vécu douloureusement ce sentiment d’arrachement.

Cette première partie va jusqu’en 1967, année où je devais passer mon baccalauréat mais où les épreuves ont été annulées alors que le 5 juin la guerre commençait. Je me souviens encore faire la fête avec mes amis avec ce sentiment de liberté retrouvée qui nous traversait. Et quand nous voyons en six jours quatre armées arabes se faire battre par l’armée israélienne, nous nous sommes sentis vraiment humiliés et honteux.

Cet échec n’était pas seulement celui des armées mais aussi celui des élites arabes et des partis politiques arabes. Alors à partir de cette période, je décide qu’il faut que je m’engage politiquement, et je le fais dans ce qui était à l’époque le mouvement anticolonialiste et laïque qui me correspondait le plus, sans dogmatisme et avec un vrai esprit d’ouverture, le Fatah.

Là commence le second cycle de ma vie et la première chose que je fais est d’aller travailler auprès des palestiniens dans les camps de réfugiés, camps qui étaient à cette époque interdits aux non résidents. C’est d’ailleurs là que commença la première Intifada puisqu’en 1969, dans les 15 camps de réfugiés palestiniens qui entouraient alors Beyrouth, un soulèvement organisé par l’OLP permet de mettre dehors les personnels de l’ONU et de la sécurité libanaise, et de transférer la gestion de la vie des palestiniens réfugiés à des comités populaires. Il faut se rappeler qu’à cette époque, ces camps réunissaient près de 400.000 personnes dans un pays qui comptait une population de 3 millions d’habitants.

Dans le même temps, je suis des cours de sociologie à l’université américaine de Beyrouth et j’entame une thèse de doctorat en 1972 sur le thème justement de la structure sociale des camps de réfugiés palestiniens. Mon intention était de comprendre comment une population, réfugiée depuis des dizaines d’années, puisqu’elle est partie en 1948, reste aussi unie dans son aspiration à une identité nationale et capable de faire une intifada, c’est à dire un soulèvement, comme celui auquel je venais d’assister en 1969.

Bien sur je ne pouvais pas imaginer que vingt ans après, les palestiniens se soulèveront encore mais à ce moment je voulais comprendre comment une société civile prend son sort en main. Et c’est pour cela que j’ai depuis un attachement particulier avec les sociétés civiles et leur actions au sein de milieux défavorisés. Un camp de réfugié, c’est comme un bidonville, c’est comme un quartier pauvre au Brésil, comme une favela au Chili. Ce sont des milieux sociaux marginalisés, défavorisés et humiliés, dépossédés de leur dignité. En Palestine s’ajoute certes le côté politique avec l’occupation militaire et la diaspora, mais du point de vue humain, le défi est la même.

Le Maroc, un pays où les marocains se sentent bien dans leur identité

En 1974, quand je finis ma maitrise, je décide de m’inscrire à l’Ecole Pratiques des Hautes Etudes de Paris afin de poursuivre un doctorat sur le même sujet. Et en 1977, je rencontre mon mari, le romancier marocain Mohammed Berrada. Je m’installe alors au Maroc où j’ai un véritable coup de foudre pour ce pays car je venais d’un endroit où tout le monde se faisait la guerre, palestiniens et libanais, chrétiens et musulmans, étrangers et nationaux. Là, j’arrivais dans un pays où les marocains se sentent tellement bien dans leur identité, dans cette longueur de leur histoire, dans cette mémoire qu’ils ont depuis la manière de préparer le thé jusqu’à la manière de vivre entre amazigh et arabe.

Je suis restée au Maroc jusqu’en 1989, période où le Président Arafat décide alors de nommer des femmes ambassadrices car il était émerveillé par le rôle joué par les femmes dans la lutte palestinienne, et notamment lors de la première Intifada qui commence en 1987. J’ai ainsi été nommée ambassadrice de la Palestine en Irlande, et puis en Hollande, au Danemark, à l’Unesco et enfin en France, pays que j’ai beaucoup aimé car la société civile française est celle qui comprend le mieux le monde arabe.

Fin 2005, je quitte Paris pour rejoindre Bruxelles pour représenter la Palestine auprès de l’Union européenne car je considère que la relation entre l’Europe et le monde arabe est stratégique et civilisationelle. La géographie nous montre en effet que les pays du Sud de la Méditerranée et ceux du Sud de l’Europe ont une histoire et une culture communes.

Le Maroc est comme l’alter égo de l’Europe, le frère jumeau séparé par l’eau

Almaouja.com – Justement si l’on se réfère aux années 1990 période où les responsables européens, avec Jacques Delors en tête, ont pu faire émerger au niveau politique cette réalité euro-méditerranéenne, et que l’on compare ces grands idéaux d’alors avec la situation actuelle, comment comprendre ce qui s’est passé ? Où a été selon vous le point d’achoppement qui fait qu’aujourd’hui l’on ne parle plus de cette ambition euro-méditerranéenne ?

LS – C’est à cause de la bureaucratisation du projet européen et de sa dépolitisation. Puisqu’un grand nombre de pays n’ont pas voulu d’union politique, le projet des fondateurs de l’Europe est devenu un projet technique au service du seul business. Ils ont créé l’union financière, aboli les frontières pour avoir des conditions de travail plus faciles. Et vis à vis du monde, les européens se sont montrés avant tout intéressés par l’accession aux grands marchés commerciaux, comme celui de l’Afrique ou du monde arabe, mais ils ne voulaient surtout pas avoir une position commune sur les questions politiques, pas seulement la Palestine mais aussi comme on le voit aujourd’hui sur l’Ukraine.

Le projet fondateur de l’Europe visait à construire une puissance régionale qui devait trouver sa place aux côtés de la puissance américaine et soviétique. Mais très vite les élites européennes ont contré cette orientation.

Almaouja.com – Lors d’une interview données récemment au journal Médiapart, vous avez eu des mots très forts vis à vis de l’Europe en usant du terme de lâcheté.

LS – Oui sur le Palestine, il y a eu lâcheté de la part de l’Europe. Ce n’est pas le cas sur d’autres sujets comme au Maroc où là l’Union européenne a fait le plus d’effort mais c’est parce que le Maroc est comme l’alter égo de l’Europe, le frère jumeau séparé par l’eau. Tandis que la Palestine exige que l’on soit sévère à l’égard d’Israël or les européens sont devant Israël d’une telle lâcheté ce qui fait qu’Israël détruit régulièrement tout ce que les européens investissent en Palestine. Depuis 2008, les européens investissent 1 milliard et demi d’euros chaque année. Ils ont construit un aéroport et Israël l’a bombardé, ils ont commencé à construire un port et Israël l’a bombardé. Ils ont soutenu les accords d’Oslo et Israël les ont vidés de leur contenu. Et les européens n’osent pas prendre une seule sanction contre Israël.

Almaouja.com – Comment expliquez-vous cette lâcheté ?

LS – Il y a deux raisons principales. C’est avant tout l’intervention de la question juive et donc la mémoire de la Shoah dans les processus électoraux des pays européens. Les lobbies israéliens pèsent très lourds dans toutes les élections, bien plus que le lobby non existant des populations maghrébines en Europe, comme en France ou en Belgique où leur communauté, en tant que non autochtone, est pourtant la plus importante. C’est donc l’instrumentalisation de la culpabilité vis à vis de la Shoah qui donne autant de force à Israël.

La seconde raison est la vision dépolitisée des relations avec les pays du Sud. Il faut se souvenir que le projet euro-méditerranéen initié à Barcelone en 1993 avait une vision non seulement étatique de la coopération entre tous les pays riverains du pourtour méditerranéen mais aussi qu’il impliquait les sociétés civiles. Et chaque sommet entre les gouvernements de ces pays s’accompagnait alors de rencontres entre les sociétés civiles. Des forums sociaux se tenaient en parallèle et j’ai pu moi-même y rencontrer tous les militants et acteurs citoyens de la Mauritanie jusqu’à la Turquie, dont ceux d’Israël. Ces rendez vous citoyens ont été annulés au profit de rendez vous techniques qui assurent l’établissement d’accords commerciaux et sur ce plan, les européens sont plus intéressés par Israël que par les arabes qui ne produisent pas grand chose.

Israël les intéresse beaucoup notamment dans le domaine de la pharmacologie ou des armes. C’est en effet un des leaders dans la fabrication des drones militaires et des médicaments génériques et un récent accord lui permet de vendre ses médicaments en Europe sans payer de taxes. Israël est un meilleur client, le portefeuille de ses échanges avec l’Europe étant de 30 milliards d’euros.

Le cycle du printemps arabe se poursuivra en temps voulu

Almaouja.com – Quel regard portez vous sur les « printemps arabes » qui ont traversé les sociétés de nombreux pays du Sud méditerranéen ?

LS – Ce que l’on a appelé le « printemps arabe » est pour moi une Intifada arabe. Il a perdu sa première bataille mais il faut comprendre qu’en réalité ces soulèvements relèvent d’une véritable tectonique des sociétés arabes qui ont vu là leur premiers mouvements depuis les indépendances de tous ces pays. C’est le premier vrai soulèvement où les citoyens, et les jeunes comme les femmes en premier lieu, expriment, en dehors des partis politiques ou des syndicats, leur souhait de participer à la définition de leur société. Ils disent : nous voulons être les artisans de notre avenir.

Ce mouvement n’a pas abouti du premier coup, et c’est normal. Ses acteurs n’étaient pas encore organisés ni assez expérimentés pour participer à des élections démocratiques. Il faut du temps pour organiser des élites nouvelles, pour faire émerger des partis politiques avec des programmes sérieux. Les seuls qui étaient organisés étaient alors les organisations islamistes et ils ont pris le devant de la scène mais ce n’est que temporaire.

Certes, ce premier cycle du printemps arabe a favorisé l’émergence d’un djihadisme barbare qui, s’il relève d’une pathologie, demeure directement lié à l’essor du salafisme dans le monde depuis l’émergence du wahhabisme parti d’Arabie saoudite. Cette lecture rétrograde de l’Islam s’est développée de partout, comme en France et en Europe, sans que personne n’intervienne.

Mais je reste confiante car je sais que le cycle du printemps arabe se poursuivra, en temps voulu.

Les enjeux sont humains et pas simplement commerciaux

Almaouja.com – Que faire face à cette situation ?

LS – Il faut une autocritique profonde des arabes et des musulmans. Il faut que les musulmans disent haut et fort que la version de l’Islam diffusée par les djihadistes n’est pas l’Islam. Les Etats, les élites et les citoyens doivent le dire tous les jours. Pour ma part, je le dis tout le temps car je suis de culture musulmane.

Deuxièmement, il faut que les européens fassent eux aussi leur autocritique car ils ont jadis soutenu des anciens dirigeants comme en Tunisie et en Egypte alors que maintenant ils applaudissent les révoltes arabes et appellent à la démocratisation de ces pays. Il faut qu’ils reconnaissent qu’ils n’ont rien compris à ce qui s’est passé, au même titre qu’ils ont accepté le développement du salafisme dans leurs sociétés alors que ce dernier n’est pas tombé du ciel par hasard mais qu’il a été soutenu par des pays comme l’Arabie saoudite et le Qatar, pays avec lesquels les européens font des affaires.

Les européens doivent reconnaitre que c’est avec les sociétés civiles qu’il faut travailler et qu’ils convient donc d’être à l’écoute de ces sociétés civiles des pays du Sud. La propriété du projet euro-méditerranéen doit désormais appartenir à tous, être partagée entre tous. Les enjeux sont humains et pas simplement commerciaux car ce qui nous réunit tous est avant tout d’ordre culturel.

Tout le monde est impliqué dans cette grande crise et tout le monde doit s’efforcer de trouver des solutions. Pour cela, il nous faut analyser d’où vient la violence et cette violence ayant aujourd’hui pleinement traversée les frontières, cela peut sans aucun doute aider à réveiller les esprits des européens.

Il y a au Maroc une dimension naturelle de la diversité

Almaouja.com – Le Maroc semble garder une stabilité dans ce chaos et il a peut être un rôle à jouer dans cet ensemble. Qu’en pensez vous ?

LS – Il n’y pas de garantie de stabilité mais le Maroc a certainement un rôle à jouer car ce pays a un rapport à lui-même singulier. La monarchie en place est le seul pouvoir qui a une légitimité historique de mille ans d’âge et le pays a une culture arabe qui depuis longtemps se mêle à la culture amazigh. Le Maroc a aussi une présence française qui, au delà de la dimension coloniale, a laissé une langue et une culture. Lyautey est certes un général colonisateur mais il a sauvé les vieilles villes du Maroc en interdisant qu’on y construise quoique ce soit, comme à Fès, Meknes, Rabat et Marrakech. La France a ainsi apporté un peu de la philosophie des lumières ce qui a confronté le Maroc très tôt à une modernité européenne. Il y a une amazighité, plus ancienne que l’arabité, et qui aujourd’hui, grâce au Roi Mohammed VI, a toute sa place dans le pays.

Je reviens aujourd’hui au Maroc et je vais dans le Rif, je vais à Essaouira chez les Gnaouas, je vais dans le haut Atlas chez les berbères, je vais à Tamgroute dans la bibliothèque ancienne des Naciri, et je finis à Fès, la ville des Andalous. Tout cela c’est l’identité du Maroc. Il y au Maroc une dimension naturelle de diversité et les marocains savent pourquoi ils sont marocains. Tout cela peut aider les autres pays dans la crise actuelle mais il faut aujourd’hui qu’émergent plus d’instruments de construction de la démocratie afin que les jeunes puissent être convaincus que leur avenir est au Maroc et qu’ils cessent de chercher à partir ailleurs.

Israël cherche à atomiser la société palestinienne

Almaouja.com – Je ne peux terminer cet entretien sans vous demander comment vont les palestiniens ?

LS – Mal, ils vont très mal. Les palestiniens ont vraiment cru qu’avec Oslo, ils avaient arraché la reconnaissance mutuelle et la solution des deux Etats. Le plus important est certes que ces accords d’Oslo ont ramené les palestiniens en Palestine mais nous avons vraiment cru que nous irions plus loin.

Yasser Arafat avait réussi à convaincre son peuple de ne revendiquer que 22 % de la Palestine historique pour ainsi avoir un Etat dans la Cisjordanie, la Bande de Gaza avec Jérusalem Est comme capitale pour faire une paix définitive avec Israël. Yasser Arafat avait surtout réussi à demander à tous les pays arabes de reconnaitre Israël car la clé de la légitimité d’Israël est dans les mains de ses victimes palestiniennes.

Après 25 ans, nous devons admettre que le monde n’a pas saisi la chance d’avoir un dirigeant comme Yasser Arafat. Aujourd’hui, les accords d’Oslo ne sont toujours pas mis en œuvre. En 1999, l’Etat palestinien devait être assuré, or en 2015, nous sommes encore sous occupation militaire. Il y a un mur qui n’existait pas, il y a trois fois plus de colonies qu’en 1993, et Israël a le pire gouvernement de son histoire. Et que font les américains et les européens, rien. Que font les pays arabes ? Rien. Ils font la guerre au Yémen. Les palestiniens sont donc profondément choqués et très déçus justement par leurs amis arabes et européens.

Ils sont démoralisés en plus par la scission interne au sein de leur société entre le Hamas et le Fatah, entre la Bande de Gaza et la Cisjordanie. Cette scission est profonde car elle s’éternise or elle vient contredire l’esprit même de la Palestine et de l’OLP en particulier qui lui était la représentation de toutes les idéologies, de toutes les singularités palestiniennes éparpillées dans différents endroits.

Israël a réussi à atomiser la société palestinienne sous prétexte de sa sécurité, et cette fragmentation de la société palestinienne vise, comme cela s’est produit en Irak ou en Syrie, à une tribalisation de la société. Il y a là le risque de guerre civile, et c’est manifestement le but stratégique de certains.

La société civile palestinienne est forte parce qu’elle est chez elle

Almaouja.com – Ils semblent donc avoir gagné pour l’instant ?

LS – Non. Lorsque vous êtes occupés, il en faut beaucoup pour remplacer le sentiment légitime d’une lutte nationale par une lutte tribale ou confessionnelle car ces luttes viendraient nier l’identité nationale. Il y a certes une scission entre nous mais il y a surtout une fuite des forces vives de la Palestine pour le reste du monde. La population est exténuée. Elle ne peut pas sortir, pas circuler, pas travailler. Les vieux restent, et les jeunes partent. Il faut mettre fin à l’occupation, là est l’urgence immédiate.

J’ai une confiance aveugle dans la vitalité de la société civile palestinienne qui est plus forte que tout le monde. Plus forte que ses responsables politiques, plus fortes que les pays arabes et qu’Israël. Soyons certains que la guerre civile ne pourra pas prendre pied en Palestine. La société civile palestinienne est forte parce qu’elle est chez elle, parce qu’elle a fait son Intifada et qu’ainsi elle a retrouvé confiance en elle même.

Elle a une résilience de Job et elle ne lâchera pas prise facilement et c’est avec elle qu’il faut travailler pour construire l’avenir.