Une éducation orientale / Charles Berberian

Il n’est sans doute pas facile de se définir lorsqu’on est né à Bagdad d’une mère d’origine grecque et d’un père arménien, et qu’on a grandi à Beyrouth jusqu’à l’âge de 10 ans, juste avant que n’éclate la guerre civile au Liban… A travers ses propres souvenirs et la reconstitution de son histoire familiale, Charles Berberian nous invite à partager son retour aux origines, qui s’impose comme le livre le plus intime et universel de toute son oeuvre. Un plaidoyer humaniste en faveur du dialogue entre les cultures, mis en images avec chaleur et générosité.

Prix : 39chf

RetroActive / Ibrahim Moustafa

2054. Tarik est un fonctionnaire d’un genre particulier : son département utilise le voyage dans le temps pour modifier le passé et façonner le présent. Mais lorsque des anomalies se manifestent dans la ligne du temps, Tarik est chargé d’en découvrir la source. Avant cela, il lui faudra trouver comment s’échapper de la boucle temporelle dans laquelle il se retrouve piégé…

 

Prix : 30chf

Comment réussir sa migration clandestine / Salim Zerrouki

Comment dénoncer ce que l’Europe veut à tout prix ignorer ? L’Algérien Salim Zerrouki utilise un humour cinglant, noir, horriblement grinc ? ant et dérangeant pour raconter ce que l’Europe appelle  » crise migratoire  » et regarde comme une menace. Selon l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), près de 17 000 personnes sont mortes ou disparues en Méditerranée depuis 2014. En réalité, elles sont bien plus nombreuses. Parmi les migrants qui meurent chaque année dans le monde, près de trois sur quatre perdent la vie aux portes de l’Europe. Salim Zerrouki tente de réveiller le peu d’humanité qui sommeille en nous. Alors que l’Union européenne finance des garde-côtes libyens chargés de ramener les migrants dans les camps de détention, qu’elle empêche les ONG de secourir les embarcations en perdition en Méditerranée, Salim Zerrouki s’efforce – ; quitte à choquer – ; de nous faire prendre conscience de nos responsabilités. Comment réussir sa migration clandestine délivre des conseils essentiels pour survivre à la noyade, aux viols, à la torture, au vol d’organes. Neuf histoires indépendantes. Toute ressemblance avec des faits réels n’est pas fortuite…

 

Prix : 21CHF

Lisa et Mohamed : Une étudiante, un harki, un secret… / Julien Frey & Mayalen Goust

Paris, juin 2000. Lisa, étudiante, loue une chambre chez le vieux Mohamed. Retraité veuf et bourru, Mohamed est un ancien harki, un supplétif de l’armée française en Algérie. Lisa et Mohamed ignorent encore que leur rencontre va faire ressurgir le passé. Celui des harkis. Ces hommes qui n’ont aujourd’hui toujours pas le droit de retourner en Algérie. Après L’oeil du STO, Julien Frey continue son travail de mémoire des zones sombres de notre passé en abordant avec sensibilité la question encore douloureuse des harkis. Le travail en couleur de Mayalen Goust en souligne toute l’humanité.

 

Prix : 34CHF

Dans « Les oiseaux ne se retournent pas », Nadia Nakhlé donne visage et voix aux enfants migrants

À travers le récit du périple d’une petite fille qui a pris le chemin de l’exil pour fuir la guerre et ses atrocités, l’artiste pluridisciplinaire française d’origine libanaise signe un magnifique premier roman graphique couronné de prix. Découverte.

Orient Le Jour / Par Zéna ZALZAL, le 11 février 2021 à 00h01

Dans « Les oiseaux ne se retournent pas », Nadia Nakhlé donne visage et voix aux enfants migrants

Les oiseaux ne se retournent pas (éditions Delcourt) s’ouvre sur le dessin d’une petite fille jouant avec son cerf-volant rouge au milieu des ruines d’une ville détruite par les bombardements. Beyrouth ? Alep ?

Homs ? Mossoul ? Ou ailleurs… Impossible de situer cette ville, de définir ce pays en guerre qu’évoque Nadia Nakhlé dans son premier album graphique. Sinon qu’il s’agit de l’une de ces terres d’Orient si fertiles en conflits, en massacres et en tragédies.

Il y a quelque chose de l’ordre du songe, du conte onirique dans son récit dessiné du périple d’Amel, 12 ans, qui n’a d’autre choix que de quitter son pays mis à feu et à sang. Ses parents en ont ainsi décidé. Ils l’ont confiée à une famille chargée de l’accompagner en France. Mais celle-ci la perd à la frontière. Défiant sa peur, les menaces et la solitude, l’enfant poursuivra sa route. Sur son chemin, elle croisera un jeune joueur de oud, ancien soldat qui a déserté la violence des combats et qui l’aidera dans sa traversée…

Un dessin d’une délicatesse et d’une beauté envoûtantes, délibérément sombre et cependant éclairé de touches de couleurs fortes, porte ce roman graphique aussi poétique que paradoxalement inspiré de la réalité la plus noire. Celle de l’exil auquel sont forcées les populations des pays en guerre. Et pas que les adultes.

Amel entre les ruines… dans la planche d’ouverture du roman. Photo DR

Un quart de mineurs dans les camps de refugiés

Saviez-vous qu’au moins un quart des migrants qui rejoignent l’Europe sont des mineurs isolés qui fuient la même barbarie que leurs aînés ?

Vous êtes-vous demandé ce qu’il se passe dans la tête de ces enfants qui traversent la guerre et tentent d’y échapper ? Comment se reconstruisent-ils après avoir côtoyé l’horreur si jeunes ? Ce sont autant ces interrogations que le sentiment de révolte de l’auteure face à la situation des réfugiés, et notamment celle des enfants, victimes innocentes des belligérances des adultes, qui sont à l’origine de cet album graphique. Le premier de Nadia Nakhlé, une artiste pluridisciplinaire issue de l’univers des films d’animation et de la mise en scène de spectacles. « J’ai ressenti le désir de transformer cette sombre réalité par le dessin et la poésie.

Comme une tentative de répondre à la douleur de l’exil par la beauté, l’humanisme et l’espoir », confie à L’OLJ cette jeune femme de 35 ans jointe par téléphone. Le point de départ de l’écriture de cette histoire était donc la volonté de l’auteure de mettre en lumière la situation de ces mineurs arrachés à leur pays, leur famille, leur enfance… De raconter la dureté de leur parcours vers l’exil. Mais aussi d’évoquer leur regard qui reste celui d’un enfant, empreint d’imaginaire malgré toutes les vicissitudes. Ce regard nimbé d’espoir et de résilience, pourvu qu’il croise un brin d’humanité, un geste de solidarité, elle l’a transmis à Amel, personnage fictif qu’elle a façonné en s’inspirant du réel des enfants dans les camps de réfugiés qu’elle a visités à Calais, en France, ou encore au… Liban. Car Nadia Nakhlé est, comme son nom l’indique, d’origine libanaise. « Je suis née en France d’un père libanais, de Zahlé très précisément, qui a grandi dans cette ville et y a vécu toute sa jeunesse jusqu’au début de la guerre du Liban. Mais mon père est né à Homs, en Syrie, où son propre père était en mission de travail. Lorsque j’ai vu les images de cette ville détruite par les bombardements, j’ai été bouleversée. Ça m’a ramenée à mon histoire familiale traversée par l’exil dû à la guerre. Et sans doute enclenché mon désir de faire passer cette mémoire-là… » révèle-t-elle. Un récit totalement fictif, qui n’a aucun lien avec la réalité du parcours de son père ou l’émigration vécue par les membres de sa famille, « aujourd’hui éparpillés entre le Liban, la France, le Canada, le Brésil et les États-Unis », précise l’auteure. Ajoutant que son objectif était « de sensibiliser les lecteurs au fait qu’on ne choisit pas de fuir un pays en guerre. On y est forcé. Tout en transmettant un message d’espoir et de solidarité à ceux qui tentent d’échapper à cet enfer ». Force est de constater que pour son coup d’essai, cette primo-auteure et illustratrice a réalisé un coup de maître. Son ouvrage, paru en juin 2020, a reçu trois prix la même année : le prix Première du roman graphique (prix organisé par la Radio Télévision belge francophone – RTBF) ; le prix Solidarité en partenariat avec L’Obs ; et le prix des Lycées de l’Académie de Poitiers, décerné dans le cadre du Festival international de la BD d’Angoulême. Une récompense qui tient particulièrement à cœur à celle qui a fait sienne cette citation d’Antoine de Saint Exupéry : « Je suis de mon enfance comme je suis d’un pays. »

Un roman graphique à l’univers mêlé de poésie, de tragédie et d’espoir. Photo DR

Dessins et citations

Des citations, Nadia Nakhlé y a d’ailleurs largement recours dans Les oiseaux ne se retournent pas. Puisant surtout dans les mots des poètes et penseurs du monde arabe (Gibran Khalil Gibran, Andrée Chedid, Mahmoud Darwich…) pour introduire chaque chapitre de ce magnifique ouvrage. Pour accompagner cette plongée poétique, graphique et allégorique dans le drame que vivent de nombreux humains aujourd’hui. Intercalé de planches au tracé riche en arabesques et enluminures très orientalisantes, son récit est aussi largement inspiré de la symbolique de l’envol initiatique puisé dans Le Cantique des oiseaux du poète persan Farid al-Din Attar.

Autant d’éléments visuels et narratifs qui signent la facture personnelle de cette artiste engagée dans une œuvre gorgée d’humanité et tournée vers l’espoir. Comme celui qu’incarne son héroïne, « cette enfant qui va s’appuyer sur l’art et la musique pour garder ses racines dans son cœur et se construire tout en affrontant l’exil ».

Et un spectacle aussi…

Sauf que sa Amel ne se borne pas à n’être qu’une héroïne de roman, fût-il graphique. Pour sa créatrice qui aime, dit-elle, associer dans son langage artistique, l’écriture au dessin et à la mise en scène, il n’était pas question de ne pas la faire exister sur scène d’abord puis dans un film d’animation dont la sortie est prévue pour 2023. Les deux projets ont déjà été enclenchés. L’ouvrage imprimé a ainsi été décliné en « spectacle musical et dessiné », dont la première a eu lieu en janvier 2020 juste avant l’instauration des mesures sanitaires renforcées en France. Accompagné de projections des planches tirées du livre, il est interprété par un joueur de oud, un pianiste et deux comédiennes, « dont l’une, s’exprime en français et en arabe. Il s’agit d’ailleurs de Maya Sanbar, fille d’Élias Sanbar, le traducteur de Mahmoud Darwich, qui est également d’origine libanaise », signale son auteure-metteuse en scène. Un spectacle dont le calendrier des représentations est évidemment tributaire de la levée du confinement en France. Et peut-être aussi au Liban ? Car Nadia Nakhlé rêve de présenter ce projet dans son pays d’origine. L’appel est lancé.

Nul doute que les Libanais, lecteurs ou spectateurs, se retrouveront dans Les oiseaux ne se retournent pas. Et notamment dans certaines citations intelligemment choisies par la jeune auteure-illustratrice, comme celle de Mahmoud Darwich : « Nous souffrons d’un mal incurable qui s’appelle l’espoir », ou cette autre de Gibran Khalil Gibran : « La vérité est comme les étoiles. Elle n’apparaît que dans la nuit obscure », qui ne manqueront pas de faire écho à ce qu’ils vivent encore et toujours !

 

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Tunnels / Rutu Modan

Des archéologues israéliens et des passeurs clandestins palestiniens percent le sol de la Terre sainte chacun de leur côté du Mur. Les deux équipes se rencontreront à la croisée des tunnels dans un récit politicoburlesque orchestré par Rutu Modan.

 

Prix : 39chf

Carnets d’Orient : 1830-1954 : L’intégrale (Tome 1à 5) – Jacques Ferrandez

Ce premier tome de l’intégrale des Carnets d’Orient de Jacques Ferrandez réunit en un volume unique les cinq premiers tomes de la série (de Carnets d’Orient au Cimetière des princesses) – soit l’époque historique s’étendant des premières années de la colonisation de l’Algérie à la veille de l’indépendance. Bonus : en complément de l’album, un carnet de croquis relié, à la manière d’un fac-similé, rassemble les peintures réalisées par Joseph Constant, le personnage principal du premier volume de la série.

 

Prix : 57chf

Nos vacances au bled – Chadia Chaïbi Loueslati

Après le succès de Famille nombreuse, Chadia poursuit son cheminement familial avec Nos vacances au bled. La famille s’est agrandie et vit en banlieue parisienne. Les parents décident d’acheter un terrain en Tunisie et d’y faire construire LEUR maison pour se rapprocher de la famille restée au bled et de pouvoir partir en vacances chaque été. Tout s’organise rapidement. Les enfants sont surexcités, certains prendront l’avion, les parents chargent la voiture à bloc. Pour les enfants c’est la découverte d’une autre culture et pour les parents, c’est la gestion du chantier qui prendra toute leur énergie. Ces vacances d’été resteront à jamais gravées dans la mémoire de Chadia et de ses frères et soeurs. Cet album est une ode à la famille.

 

Prix : 34chf

L’odyssée d’Hakim : De la Turquie à la Grèce – Fabien Toulmé

En exil loin de son pays natal, Hakim trouve un peu d’espoir dans la naissance d’un fils. Mais de petits boulots en difficultés, la complexité du monde le rattrape une nouvelle fois et sépare sa famille. Livré à lui-même avec son enfant, Hakim va tenter de survivre, malgré les obstacles et la précarité, jusqu’à envisager le pire : monter sur un canot de fortune pour trouver un salut…

 

Prix : 42chf

Festival de Cannes : le Maghreb en force

Festival de Cannes : le Maghreb en force

Pas moins de cinq films de cinéastes maghrébins sont présents dans les quatre sélections cannoises. La confirmation d’un renouveau certain du 7e art dans la région.

Par notre correspondant à Tunis, Benoît DelmasPublié le 12/05/2019 à 14:21 | Le Point.fr

Avec Venise et Berlin, Cannes est un baromètre de la création cinématographique mondiale. Chaque année, les films choisis composent une photographie des lignes de forces du cinéma des cinq continents. Les quatre sélections dévoilées à la mi-avril (Compétition pour la palme d’or, Un Certain regard, la Semaine de la critique, la Quinzaine des réalisateurs) proposeront deux films marocains, deux films algériens et une œuvre tunisienne. Plus au sud, le Sénégal sera en lice pour la palme d’or avec la réalisatrice Mati Diop pour son premier film Atlantique. La dernière présence d’un film sénégalais à Cannes, pour la palme d’or, date de 1992 : Djibril Diop Mambéty y avait concouru avec Hyènes, considéré par Martin Scorsese comme une œuvre phare de l’histoire du cinéma. Le jury pour la palme d’or sera cette année présidé par le Mexicain Alejandro González Iñárritu, auteur de Babel, oscarisé pour Birdman et Le Revenant avec Leonardo DiCaprio.

Le renouveau algérien

Mounia Meddour présentera son second long-métrage, Papicha, dans la salle Debussy du Palais des Festivals. Elle intègre la sélection officielle à travers Un Certain regard. Une catégorie souvent considérée comme l’antichambre de la course à la palme d’or. Cette coproduction franco-algéro-belge sera distribuée en France par Jour2fête qui vient de sortir avec succès le J’veux du soleil du député France insoumise François Ruffin. Un peu plus loin du Palais, à un jet de cocktail du Carlton, La Semaine de la critique, dont Charles Tesson est le sélectionneur, présente des premiers et des seconds films. Amin Sidi-Boumédiène y signera Abou Leila. Tourné pour bonne part dans le Grand Sud, c’est le récit d’une chasse à l’homme terroriste par deux amis d’enfance. L’an dernier, deux films présentés dans cette sélection ont fait une très belle carrière, obtenant moult césar : le Guy d’Alex Lutz et Schéhérazade de Jean-Bernard Merlin. Aller à la Critique est l’assurance d’une forte curiosité critique et médiatique.


Le Maroc consolide

L’actrice et scénariste Maryam Touzani passe le cap de la réalisation avec succès. Le délégué-général du Festival de Cannes, Thierry Frémaux, a retenu Adam en sélection officielle, catégorie Un Certain regard. Elle est l’auteur de deux courts-métrages et la coscénariste et interprète de Razzia, film choral de Nabil Ayouch qui a connu un grand succès au Maroc. L’auteur de Much Loved – interdit dans son pays – est le producteur d’Adam. Le premier long-métrage d’Alaa Eddine Aljem, Le Miracle du Saint Inconnu, aura quant à lui les honneurs de la Semaine de la critique avec un synopsis prometteur. Un voleur cache son important butin sur une colline désertique. À sa sortie de prison, des années plus tard, il découvre qu’un mausolée a été construit au même endroit. Il va lui être difficile de récupérer son magot. Les deux films marocains concourent pour la Caméra d’Or qui récompense un premier film présenté dans les quatre sélections. Jim Jarmusch, Jafar Panahi ou Naomi Kawase ont obtenu ce prix prestigieux.

La Tunisie, une habituée de Cannes

Depuis plusieurs années, Cannes déroule son tapis rouge à une jeune génération de cinéastes tunisiens. La Belle et la meute de Kaouther Ben Hania en 2017, Weldi de Mohamed Ben Attia en 2018 et désormais Ala Eddine Slim en 2019 avec Tlamess. Son premier film, The Last of Us, avait frappé les esprits au Festival de Venise 2016. Il y avait obtenu le Lion du futur. Une récompense que confirme cette sélection à la Quinzaine des réalisateurs.

Yasmina Khadra en film d’animation

Pour sa part, le romancier algérien Yasmina Khadra verra l’adaptation des Hirondelles de Kaboul projeté en sélection officielle. Ce film d’animation, cosigné par Zabou Breitman et Éléa Gobbé-Mévellec, suscite une forte curiosité dans le métier. Le film sortira le 4 septembre en France.